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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/121

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en sût rien dans sa maison qu’à cinq heures du soir. Il était tombé malade à Issy, chez l’abbé Brizard, et ce bon abbé n’avait su autre chose que de le renvoyer à Paris, au lieu de le faire secourir sur-le-champ ; s’il meurt, ce sera à ce digne prêtre qu’on en aura l’obligation.

Le cardinal de Fleury, qui n’a rien su que tard de cette sottise effroyable de l’abbé Brizard, a envoyé ce matin faire bien des excuses au moribond. Il a été saigné trois fois. Il avait cette nuit un bras paralytique. La saignée, l’émétique et la fièvre, le sauveront peut-être.

Je ne suis point en apoplexie, mais c’est de toutes les maladies en ie la seule qui me manque.

Je baise les ailes de mes anges. Mme du Châtelet, qui revient, vous fait mille compliments.


1495. — À M. DE LA ROQUE[1].
Mars.

Permettez, monsieur, que je m’adresse à vous pour détromper le public, au sujet de plusieurs éditions de mes ouvrages, que j’ai vues répandues dans les pays étrangers et dans les provinces de France. Depuis l’édition d’Amsterdam, faite par les Ledet, qui m’a paru très-belle pour le papier, les caractères et les gravures, on en a fait plusieurs dans lesquelles non-seulement on a copié toutes les fautes de cette édition des Ledet, mais qu’on a défigurées par des négligences intolérables. Si on veut, par exemple, se donner la peine d’ouvrir la tragédie d’Œdipe, on trouve, dès la seconde page, trois vers entiers oubliés, et presque partout des contre-sens inintelligibles. Si on veut consulter, dans le tome que les éditeurs ont intitulé Mélanges de littérature et de philosophie, le chapitre qui regarde le gouvernement d’Angleterre, on y verra les fautes les plus révoltantes que l’inattention d’un éditeur puisse commettre. Il y avait dans la première édition de Londres ces paroles : « Ce qu’on reproche le plus aux Anglais, et avec raison, c’est le supplice de Charles Ier, monarque digne d’un meilleur sort, qui fut traité par ses vainqueurs[2], etc. »

Au lieu de ces paroles, on trouve celles-ci, qui sont également absurdes et odieuses : « Ce qu’on reproche le plus aux

  1. Voyez la note 1, tome XXXIII, page 282.
  2. Voyez tome XXII, page 10