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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/230

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Je tâcherai de faire fermenter ce petit levain. Je peux vous assurer que le fond des sentiments du roi de Prusse est tel qu’il était en 1741, quand il écrivit la lettre ci-jointe[1], dont j’ai l’honneur-de vous envoyer copie.

Je compte toujours lui faire ma cour, à Aix-la-Chapelle, vers le 18 de ce mois.


1596. ‑ À M. AMELOT,
ministre des affaires étrangères.
Ce 3 août.

Monseigneur, hier, après le départ de ma lettre, j’en reçus une du roi de Prusse, datée du camp de Husfelt, en Silésie, place dans laquelle il va bâtir une ville, tandis qu’il fortifie ses frontières. Il sera le 14 à Berlin, et le 18 ou le 20 à Spa, et non plus à Aix-la-Chapelle.

Je suis toujours dans la même espérance touchant le petit service que le roi de Prusse doit rendre ; mais je crains que cette démarche n’ait pas d’assez grandes suites, si ce prince reste dans les idées qu’il me témoigne. Tous ses correspondants lui ont persuadé que la France est trop affaiblie pour mettre actuellement un grand poids dans la balance. Je n’ai pu même empêcher un ami intime[2] que j’ai ici de lui écrire des choses qui doivent le dégoûter de votre alliance. Cet ami est cependant entièrement dans vos intérêts, et le roi de Prusse sent parfaitement qu’au fond votre cause et la sienne sont communes. Mais cet ami ne peut écrire autrement, de peur d’être démenti par les autres correspondants, et le roi de Prusse ne peut à présent concevoir que des idées avantageuses sur tant de rapports.

Je suis obligé de vous dire que, dans sa dernière lettre, il s’exprime dans les termes les plus durs sur la conduite passée ; mais il paraît en sentir autant d’affliction qu’il en parle avec violence.

Soyez très-persuadé que, dès l’année 1741, il a prévu tout ce qui est arrivé. Il pense à présent que, si Sa Majesté envoyait ou faisait croire qu’elle envoie un corps considérable vers la Meuse, cette démarche, bien ménagée, opérerait une très-grande désunion entre le parti anglais, qui prédomine en Hollande, et le parti

  1. On ne trouve, dans les Œuvres du roi de Prusse, ni cette lettre, ni celle dont il est question dans la lettre suivante.
  2. Le comte de Podewils, déjà nommé plusieurs fois.