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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/337

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Mais ils entendent leurs affaires,
Et c’est nous qu’ils veulent manger.

Vous les en empêcherez bien, monseigneur. Béni soit Apollon, qui vous a inspiré des choses si jolies dont je ne me doutais pas !

Pollio et ipse facit nova carmina ; pascite taurum…

(Virg., ecl. iii, v. 86.)

Il me semble que vos jolis vers, et encore moins ma chétive prose, ne produiront pas la paix cet hiver. Il vous faudra une bonne année pour accorder les araignées ; mais il y a apparence qu’on ne nous gobera pas comme des mouches.

Je vous remercie bien de votre confidence ; c’est un secret d’État que des vers d’un ministre. Le cardinal de Richelieu en faisait davantage, mais pas si bien. Je vous souhaite la bonne année, monseigneur, et je prends la liberté de vous aimer de tout mon cœur, tout comme si vous n’étiez pas ministre.


1690. — À M. THIERIOT[1].

Je vous renvoie la prose de M. le maréchal de Schmettau ; mais je n’ose encore y ajouter mes vers. Je deviens plus difficile de jour en jour sur mes faibles ouvrages, et le divertissement du mariage de monsieur le dauphin[2] me prend toute ma pauvre âme, dont l’étui est plus malade que jamais au moment que je vous écris. Ah ! mon ancien ami, une bonne digestion vaut mieux que de bons vers.


1691. — À M. DE LA CONDAMINE[3],
à la haye.
Versailles, le 7 janvier.

Votre style, monsieur, n’est point d’un homme de l’autre monde ; votre cœur pourrait bien en étre ; vous vous souvenez

  1. Les éditeurs de cette lettre, MM. de Cayrol et François, l’ont datée du mois de mai ; mais elle doit être du commencement de 1745.
  2. La Princesse de Navarre.
  3. Charles-Marie de La Condamine était parti le 16 mai 1735, avec Godin et Bouguer, pour le Pérou. Pendant ces dix ans d’absence, Voltaire lui écrivit plusieurs lettres, mais La Condamine ne les reçut pas. Le premier soin de celui-ci,