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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/42

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Je ne sais par quelle fatalité les dames se sont déclarées pour Leibnitz. Mme la princesse de Columbrano a écrit aussi en faveur des forces-vives. Je ne m’étonne plus que ce parti soit si considérable. Nous ne sommes guère galants, ni vous ni moi. Mais vous êtes comme Hercule, qui combattait contre les Amazones sans ménagement ; et moi, je ne suis dans votre armée qu’un volontaire peu dangereux.

Si nous étions à Paris, la paix serait bientôt faite et je me flatte bien que nous dînerions ensemble un jour dans cette belle maison[1] consacrée aux arts, peinte par Lesueur et par Lebrun, et digne de recevoir M. de Mairan.

Adieu, cher ennemi de mes amis adieu, mon maître, digne d’être celui de votre illustre et aimable adversaire.

P. S. Depuis cette lettre écrite, je reçois votre billet à l’abbé Moussinot. Ne me répondez point, mon cher philosophe le temps est à ménager, quoi qu’en disent les force-viviers ; mais, si vous croyez que vous me ferez plaisir en montrant à l’Académie[2] de quelle façon je pense ; si on peut voir par mon Mémoire que je ne suis pas absolument étranger dans Jérusalem, ayez la bonté de le communiquer sinon pereat.

Je me tiens pour répondu je ne veux pas un mot. Je vous embrasse, je vous estime, je vous aime autant que vous le méritez.


1426. — À M. HELVÉTIUS.
À Bruxelles, le 3 avril.

J’ai reçu aujourd’hui, mon cher ami, votre diamant, qui n’est pas encore parfaitement taillé, mais qui sera très-brillant.

Croyez-moi, commencez par achever la première Épître[3] elle touche à la perfection, et il manque beaucoup à la seconde[4].

Votre première Épître, je vous le répète, sera un morceau admirable ; sacrifiez tout pour la rendre digne de vous ; donnez-moi la joie de voir quelque chose de complet sorti de vos mains. Envoyez-la-moi dans un paquet un peu moins gros que celui d’au-

  1. L’hôtel Lambert.
  2. Mairan communiqua les Doutes de Voltaire sur les forces motrices à l’Académie des sciences, et l’examen de ce Mémoire donna lieu au Rapport imprimé du tome Ier de cette édition.
  3. L’Épitre sur l’amour de l’Étude.
  4. L’Épitre sur l’orgueil et la paresse de l’Esprit. Voyez les Remarques de Voltaire, tome XXIII, page 5.