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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/88

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runiques. Dites-moi, je vous prie, si l’histoire de dom Calmet est pleine de recherches curieuses du moyen âge, et si la dissertation sur les monnaies runiques éclaircit un peu l’histoire triste et obscure des peuples du Nord. Si vous croyez ces deux livres bons, je les achèterai.

Faites, je vous prie, mille compliments à M. de Maupertuis. Y a-t-il quelque chose de nouveau sur vos affaires ? Je crois, comme vous, qu’il faut attendre la fin de la campagne. Je vous embrasse de tout mon cœur.


1461. — À M. DE CIDEVILLE.
Bruxelles, ce 19 juillet.

Mon cher ami, celui qui a fait un examen si approfondi et si juste de Mahomet est seul capable de faire la pièce. Vous avez développé et éclairci beaucoup de doutes obscurs que j’avais ; vous m’avez déterminé tout d’un coup sur deux points très-importants de cet ouvrage.

Le premier, c’est la résolution que prenait ou semblait prendre Mahomet, dès le second acte, de faire assassiner Zopire par son propre fils, sans être forcé à ce crime. C’était sans doute un raffinement d’horreur qui devait révolter, puisqu’il n’était pas nécessaire. Il y avait là deux grands défauts, celui d’être inutile, et celui de n’être pas assez expliqué.

Voici à peu près comme je compte tourner cet endroit. Voyez si vous l’approuvez, car j’ai autant de confiance en vous que de défiance de moi-même.

Le second point essentiel, c’est la disparate de Mahomet au cinquième acte, qui envoie chercher des filles dans son boudoir quand le feu est à la maison. Je crois qu’il ne sera pas mal que Palmire vienne elle-même se présenter à lui pour lui demander la grâce de son frère : alors les bienséances sont observées, et cette action même de Palmire produit un coup de théâtre.

J’aurais voulu pouvoir retrancher l’amour mais l’exécution de ce projet a toujours été impraticable, et je me suis heureusement aperçu, à la représentation, que toutes les scènes de Palmire ont été très-bien reçues, et que la naïveté tendre de son caractère faisait un contraste très-intéressant avec l’horreur du fond du sujet.

La scène, au quatrième acte, avec Séide, qui la consulte, et leur innocence mutuelle concourant au plus cruel des crimes,