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Page:Wagner - Dix Écrits, 1898.djvu/199

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LE FREISCHÜTZ

guidera d’un morceau de chant à l’autre, et pourtant vous serez choqués de l’absence de beaucoup de choses auxquelles vous êtes habitués, et dont vous vous passerez difficilement.

L’appareil extérieur que l’on aura adapté à l’œuvre de Weber ne servira qu’à provoquer chez vous le besoin de sensations auxquelles répondent les ouvrages qui se produisent habituellement devant vous sous cette forme ; et vous serez trompés dans votre attente, car cet ouvrage a été créé par son auteur dans des vues bien différentes, et nullement pour satisfaire aux exigences du public ordinaire de l’Académie royale de musique. Là où sur nos théâtres une bande de cinq musiciens prennent le cor et le violon en main, où l’on voit quelques vigoureux gaillards, solidement bâtis, faire tourner en rond de robustes beautés, à la porte d’une guinguette, vous verrez arriver tout à coup les notabilités dansantes du jour ; vous verrez le beau danseur, qui paradait hier encore avec son superbe habit de satin couleur d’or, venir les recevoir dans ses bras l’une après l’autre ; vainement les élégantes sylphides feront de leur mieux pour exécuter des pas bohémiens, vous regretterez toujours les pirouettes et les bouffantes. Toutefois, elles en feront assez pour vous transporter par le souvenir dans la sphère habituelle de vos jouissances ; elles vous rappelleront les chefs-d’œuvre de vos grands maîtres, qui vous ont si souvent