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Page:Wagner - Tristan et Yseult, 1886, trad. Wilder.djvu/33

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ACTE PREMIER

Que ce breuvage, pour jamais,
Guérisse maintenant mon âme ! —
Pourtant, avant de boire, un mot encor, madame !
La gloire de Tristan, c’est ma fidélité !
Son supplice sera son orgueil indompté !
Piège du cœur, rêve enchanté,
Deuil éternel, charme céleste ;
Breuvage de l’oubli, je te bois sans effroi !

Il porte la coupe à ses lèvres, et boit.


YSEULT,
lui arrachant la coupe

À moi, mapart ! à moi le reste !
Âme ingrate, je bois à toi !

Elle vide la coupe et la jette loin d’elle. Tous deux profondément
émus, se regardent fixement dans les yeux et demeurent immobiles. En un instant, l’expression de leur regard passe du mépris de la mort aux ardeurs delà passion. Un tressaillement nerveux agite tous leurs membres. Ils portent convulsivement la main de leur poitrine à leur front. Leurs yeux se cherchent de nouveau, se baissent, se relèvent, pour s’attacher les uns sur les autres, avec l’expression d’une passion croissante.


YSEULT.

Tristan !

TRISTAN.

Tristan ! Yseult !

YSEULT.

Tristan ! Yseult ! Cœur infidèle !

TRISTAN.

Femme cruelle !

Ils restent silencieusement enlacés.