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Page:Wagner - Tristan et Yseult, 1886, trad. Wilder.djvu/32

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ACTE PREMIER


LES MATELOTS.

Ôhé ! Ôhé !

YSEULT.

Ôhé ! Ôhé ! Voici le port ! décide-toi ! —
Dans un instant, tous deux, nous serons près de Marke : —
Superbe et triomphant, me montrant à ton Roi,
Tu vas pouvoir lui dire :
« Voilà, mon prince, un coeur soumis,
Et tel enfin, que le tien le désire.
Autrefois de ma main j’immolai son promis,
Et lui fis présent de sa tête ;
La blessure qu’il m’avait faite,
Yseult la ferma doucement ;
Et si je vis, — Tristan l’atteste et le proclame, —
C’est grâce à la gentille dame. —
Pour moi, la belle a trahi son serment ;
Tu n’as jamais rêvé plus tendre et douce femme. —
Tantôt, sa voix grondait encor
Mais, dans les flots de pourpre et d’or,
De cette coupe pleine,
Nous avons noyé notre haine !« 

LES MATELOTS.

L’ancre en mer !

TRISTAN,
avec une impétuosité sauvage.

Levez la chaîne !
Gouvernez de l’avant,
Les mâts et les voiles au vent !

Il saisit résolument la coupe.

Reine, je sais que la nature
N’a pu vous dérober ses plus subtils secrets ; —
Jadis un baume a fermé ma blessure ;