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Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/111

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Si on se dit ceci : quand même le moment de la mort n’apporterait rien de nouveau, mais terminerait seulement la vie d’ici-bas sans être le prélude d’une autre vie ; quand même la mort apporterait seulement le néant ; et quand même ce monde-ci serait complètement abandonné de Dieu ; et quand même absolument rien de réel ne correspondrait à ce mot, Dieu, mais seulement des illusions puériles — en admettant qu’il en soit ainsi, néanmoins, même dans ce cas, j’aime mieux exécuter ce qui me semble être ordonné par Dieu, quand il en résulterait les plus affreux malheurs, que d’accomplir n’importe quoi d’autre.

Seul un fou peut penser ainsi.

Mais si on a contracté cette folie, on peut être tout à fait sûr de ne jamais regretter aucune action accomplie conformément à cette pensée.

La seule difficulté est que cette pensée ne fournit que peu d’énergie, une énergie insuffisante pour l’accomplissement des actions.

Comment accroître cette énergie ?

La prière doit l’accroître.

La pratique même de l’obéissance doit l’accroître, car chaque action accomplie pour un mobile augmente l’énergie de ce mobile.

Ou bien l’épuise, il est vrai. Il y a là deux mécanismes possibles, tout à fait distincts.

Il est de toute première importance de les discerner.

Ce qui épuise un mobile, ce sont les actions faites au delà de ce à quoi il pousse.

Donc la proportion de l’énergie mise au service de Dieu augmentera dans une âme si un grand soin est apporté à ne jamais aller au delà de ce à quoi on se sent presque irrésistiblement poussé par l’obéissance.

Autrement ou l’amour de Dieu s’épuise, ou il est remplacé, sous le même nom, par un autre amour.

Cela est tellement important — car tant d’amours charnels peuvent se glisser sous ce nom…


La prière n’est dirigée vers Dieu que si elle est inconditionnée. Prier inconditionnellement, c’est demander au