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Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/116

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qu’il tombe sur un être parfaitement pur qui le subit tout entier et le détruit.

Le Père qui est dans les cieux n’est pas atteint par nos offenses comme l’est un homme : Mais pour cette raison même, contrairement aux offenses contre les hommes, toute offense dirigée directement contre Lui retombe sur l’offenseur sous forme de malédiction ; et il ne peut alors s’empêcher d’essayer de se délivrer de ce mal en faisant du mal aux créatures. Il met en circulation un mal qui passe perpétuellement d’être en être.

C’est ce qui est arrivé à Caïn — en supposant que Caïn a sacrifié de mauvaise grâce.

Ce mal ainsi mis en circulation circule toujours jusqu’à ce qu’il tombe sur une victime parfaitement pure.

Dieu qui est dans les cieux ne peut pas détruire le mal, il ne peut que le renvoyer sous forme de malédiction. Seul Dieu ici-bas, devenu victime, peut détruire le mal en le subissant.

Ainsi la conception du mal comme satisfaction mène à la notion de rédemption avec une transposition correcte.

Le Père qui est aux cieux ne renvoie pas le mal, mais comme Il ne peut en être touché d’aucune manière, le mal retombe.

Celui qui se venge imite Dieu le Père. C’est la mauvaise manière d’imiter Dieu. Il n’est permis à l’homme d’imiter que Dieu le Fils. C’est pourquoi « Nul n’arrive au Père sinon par moi ».

Cependant : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. » Mais il s’agit là d’imiter Dieu le Père dans son abdication, dont l’Incarnation est la plénitude.

Les hommes ont toujours senti le besoin de se purifier par le sacrifice d’êtres innocents, animaux, enfants, vierges. L’innocence est au degré suprême quand le sacrifice est volontaire.

L’homme qui a reçu du mal souhaite en être délivré en le portant ailleurs : c’est là le désir de la satisfaction. Il ne désire pas l’abolir, mais l’abolir de son existence à lui, et pour cela le jeter au dehors.