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Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/191

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Le désir impuissant se détache de ses objets et revient sur lui-même. La notion de bien pur, inconditionné,

notion ineffable, entre alors dans l’âme. L’âme alors y adhère ou non.

Ce choix est un mystère.

Si elle y adhère, elle supplie de ne plus jamais avoir le choix.

Le problème est alors de consacrer à ce bien dont on ne sait que le nom la totalité de l’énergie.

Si les circonstances remettent dans l’organisme une certaine quantité de cette énergie dont s’alimente la volonté, dépenser cette énergie sans avoir de volonté. La dépenser comme on dépense une somme qui a été remise par un autre à cet effet, et en faisant usage de l’obligation pour suppléer à la nécessité partout où celle-ci a des trous.

Après la réconciliation du fils prodigue, s’il s’en va à la ville avec de l’argent, ce n’est pas comme un fils qui emporte sa part d’héritage, c’est comme un esclave qui est chargé par son maître de faire des achats dont rien ne lui reviendra et dont nul ne le remerciera. Marcher jusqu’à la ville, courir de boutique en boutique faire les achats commandés jusqu’à épuisement de l’argent qu’on lui a confié, revenir en portant des fardeaux, ou bien aller sans argent dans les champs et passer la journée à labourer, c’est équivalent pour un esclave. Si l’esclave a fidèlement dépensé l’argent pour les achats prescrits, il n’est ni remercié ni récompensé. On lui reproche peut-être de n’avoir pas su chercher les magasins bon marché. S’il a détourné un sou pour le mettre de côté ou le dépenser pour lui, il est battu.

Ainsi l’énergie supplémentaire, volontaire, doit être dépensée jusqu’à épuisement dans les activités obligatoires.

Ou bien brûlée dans la contemplation.

L’important est qu’il n’en reste pas une parcelle, soit pour le caprice, soit pour l’exercice de la volonté, S’il en reste une parcelle, c’est un vol.

(Je n’ai jamais cessé de voler.)

Quand les circonstances mettent l’énergie végétative