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Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/248

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lasse jamais et n’hésite devant aucun danger, on est tout à fait certain qu’il réussira.

Cela montre que dans ces quêtes, c’est toujours Dieu qui est cherché ou qui cherche.

Les mariages qui finissent les contes, c’est le mariage spirituel entre Dieu et l’âme. C’est pourquoi il n’y a rien à dire ensuite, sinon « ils furent heureux et ils eurent beaucoup d’enfants ».


Dans le microcosme comme dans le macrocosme, dans l’âme comme dans l’univers, le bien pur et authentique est tout à fait caché. Ainsi on n’est dans la vérité que si on se condamne absolument. Si un homme a du bien véritable en lui, ce ne peut être qu’à son propre insu.

Si j’ai fait quelque bien à un être humain, il suffit que par la suite je m’en souvienne — ne fût-ce qu’une fois et dans la solitude — cela suffit pour que la dette change de côté, et que désormais, dans la vérité, il soit le créancier et moi le débiteur.

De même sans doute si quelqu’un m’a fait du mal.

Si j’ai des débiteurs, ce ne peut être qu’à mon insu. À qui dès lors remettrais-je une dette ?

Quant à moi, je n’ai pas de dette, je suis une dette. Mon être même est une dette. Dieu ne peut remettre cette dette qu’en faisant que je cesse d’être. Que je cesse d’être dès ici-bas, encore vivante. Et en vendant ce qui reste après l’annulation de la personne, afin que cela serve : de nourriture aux créatures.

Vendre tous ses biens, cela enferme sa propre personne. On n’a pas vendu tous ses biens tant qu’on n’est pas vendu soi-même comme esclave. Mais on ne se vend pas soi-même. On est vendu.

Aimer, c’est aimer les êtres et les choses créées comme le Verbe divin les a aimées au moment où il s’est vidé pour prendre l’essence d’un esclave ; et c’est aimer Dieu comme le Christ au moment où, sur la croix, il disait « Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Aimer ce monde comme l’a aimé le Verbe divin quand il a