Aller au contenu

Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/64

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sont dans les trois dimensions. Elle exclut les rapports multiples.

Essayer de définir les choses qui, tout en se produisant effectivement, restent en un sens imaginaires. Guerre. Crimes. Vengeances. Malheur extrême.

Les crimes, en Espagne, se commettaient effectivement et pourtant ressemblaient à de simples vantardises.

Réalités qui n’ont pas plus de dimensions que le rêve.

Dans le mal, comme dans le rêve, il n’y a pas de lectures[1] multiples. D’où la simplicité des criminels.

Crimes plats comme des rêves des deux côtés : côté du bourreau et côté de la victime. Quoi de plus affreux que de mourir dans un cauchemar ?

Compensations. Marius imaginait la vengeance future. Napoléon songeait à la postérité. Guillaume II désirait une tasse de thé. Son imagination n’était pas assez fortement accrochée à la puissance pour traverser les années : elle se tournait vers une tasse de thé.

Adoration des grands par le peuple au xviie siècle (La Bruyère). C’était un effet de l’imagination combleuse de vides, effet évanoui depuis que l’argent s’y est substitué. Deux effets bas, mais l’argent plus encore.

  1. Sur le sens de ce mot dans le vocabulaire de Simone Weil. Cf. p. 176.