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Page:Weil - Sur la science, 1966.djvu/259

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investigation concernant un sujet quelconque ; on la trouvera, puisqu’elle y est ; quand nous l’aurons saisie, après une seule en examiner deux, s’il y en a deux, ou sinon trois ou tout autre nombre, et de même pour chacune d’elles, jusqu’à ce que cette chose qui était d’abord une, on voie non seulement qu’elle est une et multiple et illimitée, mais aussi quel est son nombre ; il ne faut pas expliquer à la multitude l’idée de l’illimité avant d’avoir parfaitement vu le nombre intermédiaire entre l’illimité et l’un. » (Ainsi le grave, l’aigu, les intervalles, etc. sont les notions intermédiaires entre le son et la variété illimitée des sons.) Ce passage sonne pythagoricien (Philolaüs dit que tout est un tissu de limité et d’illimité), mais les « anciens » ne peuvent guère être les pythagoriciens, vu qu’un siècle à peine sépare Platon de Pythagore. Ce « présent des dieux » transmis par les anciens », il me semble que ce ne peut être qu’une allusion à l’orphisme. Ou aux Égyptiens ? (à cause d’ « habitant plus près des dieux »). Ou aux deux peut-être. En tout cas il devait y avoir quelque chose dans les mystères sur l’un, le multiple et l’illimité.

Je crois volontiers que pour beaucoup de sculpteurs et peintres il est indifférent qu’ils aient telle ou telle conception du monde ; ce sont, je pense, ceux qui ne m’intéressent pas. Mais il me paraît difficile de soutenir que l’admiration de Giotto pour saint François n’a eu aucun rapport avec son art — ou, pour Léonard, les conceptions platoniciennes — ou, pour les cathédrales, le catholicisme (y compris les hérésies). Non que je croie que les artistes se détournent des problèmes qu’ils ont dans les yeux et les doigts pour se livrer à des spéculations abstraites (quoique cela puisse aussi se produire), mais je pense que les problèmes