Aller au contenu

Page:Widor - Initiation musicale.djvu/103

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LES ORIGINES DE LA MUSIQUE

et leur doctrine[1]. C’est elle qui mettra de l’ordre et de la méthode dans ces tonalités et qui, inconsciemment attirée par la vérité harmonique, comme l’aveugle par le soleil, préparera l’unification.

À Rome. ↔ Déjà, cinquante ans avant notre ère, Cicéron se plaignait de l’immigration hellénique : « Trop de Grecs chez nous, notre bel canto, notre accent, la pureté de notre prononciation se perdent… »

Qu’aurait-il dit un siècle plus tard ? Que dirait-il aujourd’hui en entendant le charabia italico-latin de nos chantres montmartrois ?

Bientôt, à Rome, dans le monde intellectuel et dans l’autre, on ne compte que des compatriotes de Démosthène : philosophes, rhéteurs, poètes, écrivains publics, virtuoses du chant et de la danse, acteurs, chorégraphes, précepteurs, coiffeurs, bonnes d’enfants, nourrices, tous Grecs. Au théâtre, Eschyle, Sophocle, Euripide, Aristophane, tiennent l’affiche. Les empereurs donnent le ton.

Auguste, Trajan, Adrien, Commode, créent des institutions

(101)
  1. La Grèce conquise avait conquis son vainqueur. Un texte de Juvénal illustre cette vérité historique :
    xxx« Romains, une chose me révolte, c’est que Rome soit devenue une ville grecque. Les voilà, ces Grecs, qui partent de tous les points de la Grèce, de la haute Sicyone, d’Amydone, d’Andros, de Samos, de Tralles, d’Alabanda. Tous marchent droit aux Esquilies, et vers le mont Viminal. Les voilà au cœur des grandes maisons et bientôt ils en seront les maîtres. Esprit prompt, aplomb imperturbable, parole facile, ils ont tout pour eux. En voici un ! Quelle profession lui supposes-tu ? Toutes celles que tu peux désirer. C’est un homme universel. Grammairien, rhéteur, géomètre, peintre, baigneur, augure, saltimbanque, médecin, sorcier. Un Grec, quand il a faim, sait tous les métiers. Tu lui dirais : « Monte au ciel, » il y monterait. » (Juvenal, Satire III, traduction E. Despois.)