Page:Zola - Nouveaux contes à Ninon, 1893.djvu/18

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nir auprès de moi toute cette nuit ? Je te le donne en mille. J’ai fouillé le passé, j’ai cherché dans ces centaines de pages écrites un peu partout, si je n’en trouverais pas d’assez délicates pour tes oreilles. Au beau milieu de mes rudesses, il m’a plu de mettre cette douceur. Oui, j’ai voulu ce régal pour nous deux. Nous redevenons enfants, nous goûtons sur l’herbe. Ce sont des contes, rien que des contes, de la confiture dans de la porcelaine de gamins. N’est-ce pas charmant ? trois groseilles, deux grains de raisin sec, suffiront à notre faim, et nous nous griserons avec cinq gouttes de vin dans de l’eau claire. Écoute, curieuse. J’ai d’abord quelques contes assez décents ; certains même ont un commencement et une fin ; d’autres, il est vrai, vont pieds nus, après avoir jeté leur bonnet par-dessus les toits. Mais, je dois t’avertir que, plus loin, nous entrerons dans des fantaisies qui battent absolument la campagne. Dame ! j’ai tout glané, il fallait bien te retenir la nuit entière. Là, je chante la chanson des « t’en souviens-tu ? » Ce sont nos souvenirs à la queue-leu-leu, ma fille ; tout ce qu’il y a de plus doux pour nous, le meilleur de nos amours. Si cela ennuie les autres, tant pis ! ils n’ont pas besoin de venir mettre le nez dans nos affaires. Puis, pour te garder encore,