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Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/318

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jeté par la passion et l’extase à travers les espaces de l’humanité et l’immensité des cieux ; il ne s’agit plus de susciter en nous le farouche enthousiasme, mais la tendresse et la ferveur. La voix est douce qui était rauque. On ne voit que couleurs cristallines et transparentes. Ce qui s’exprime là, c’est la formidable puissance du silence, de ce silence qui donne leur force aux grandes passions. Ces poèmes correspondent intimement à chacun des éléments de la nature ; mais ce n’est pas avec un ciel embrasé, le tonnerre ou les ouragans qu’ils s’accordent, c’est avec la paix du jardin, le calme de la maison. Là, chantent les oiseaux ; là, les fleurs embaument ; il semble que des grappes de silence pendent aux rameaux des arbres en fleurs. Les événements n’ont plus de réalité extérieure. Toute la poésie familière de la vie — qui n’est plus celle de la rue — sort, pour ainsi dire, des murs pour engager de doux dialogues sur de petites choses ; les événements sont ceux de l’intimité personnelle, de la vie quotidienne, dans l’intervalle des grandes extases. À la lueur tamisée de la lampe qui éclaire la chambre, les âmes se taisent pour échanger de merveilleuses confidences :