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Page:Zweig - Émile Verhaeren, sa vie, son œuvre.djvu/91

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d’abord la mort du désir ; puis celle de la volonté qui ne songe même plus à posséder la joie. Les nerfs, fatigués, craintifs, se dérobent à toute impression et retirent leurs antennes de l’univers extérieur. Ce que le hasard amène encore jusqu’à eux n’est plus ni couleur, ni son, ni aucune sensation. Leur faiblesse se refuse à convertir chimiquement leurs impressions : tout reste à l’état primitif de douleur sourde et lancinante. Les sensations nerveuses ne sont plus là pour alimenter les sentiments, et le désir n’est plus éveillé. Voici l’automne, toutes les fleurs sont effeuillées et l’hiver approche.

Il fait novembre en mon âme.
Et c’est le vent du nord qui clame
Comme une bête dans son âme.[1]

D’une poussée lente, mais irrésistible, monte le flot des pensées néfastes : la négation de toute signification de l’existence, l’idée de la mort. C’est le dernier désir qui vibre dans ces mots :

Mourir ! comme des fleurs trop énormes, mourir ! [2]

Tout le corps est comme une plaie mise à nu au contact du monde extérieur et faite de toutes

  1. « Vers » (les Bords de la route).
  2. « Mourir » (les Soirs).