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Premiers poèmes/Domaine de fée/Figure au théâtre

La bibliothèque libre.
Mercure de France (Premiers poèmesp. 321-323).

FIGURE AU THÉÂTRE

Dans un luxe d’or rouge à fleurs d’or mat,
dans un faste de pierres bleues,
mate,
la couronne de ses noirs cheveux aurée,
l’éclat de ses mains s’adoucissant d’anneaux
forgés au fond des ghettos,
lourds et purs pour la plus aimée,
ses yeux inclinant leurs aveux
et la douce bonté de sa bouche,
elle écoute.

Psaumes tus,
rituels de tribus en exil,
paroles au soir sur la montagne,
rêves entrecoupés des nuits d’alarmes,

ritournelles d’étranges étrangers
fuyants dans des cliquetis d’armes,
vœux éplorés des seulettes en la campagne,
bruits de bal dans l’île,
prières de nonnes de remords vêtues.

Le bal est si solitaire, sous ses yeux ;
de brefs météores de parfums s’éveillent,
jouent, paraissent, dansent, disparaissent,
le bal a vers ses yeux tant d’allégresses,
des masques sonorants se parent non pareils,
paraissent, dansent, fléchissent sous ses yeux.

Les voix de la ballade,
les dialogues sous les feuillées,
le récital de peines amères d’enfants
le cœur navré de griève peine,
les oliphants tristes du héros malade,
les jonchées de colloques épars sur la peine
universelle de l’amour mourant,
le cœur navré de griève peine.

Bruire et rire.
Voici passer les échansons.
Les coupes sont d’or mat et de topazes,

des serves blondes supportent les grands vases
et s’agenouillent à l’échanson.
Bruire et rire.

Voici sur le fond du théâtre,
voici passer les histrions
dialoguant des chansons d’amour profond.