La Ronde du Trouvère/Amour

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A. Siffer (p. 37-40).

AMOUR



Ô maître halluciné des âges chrétiens,
Ô toi qui m’épouvantes en ta ferveur mystique,
Prends mon cœur en ta puissante main
Et le sculpte ainsi qu’une église gothique.

Tout d’abord fais surgir des boucs, des serpents,
Des dragons, des hydres et des chimères
Et tous les monstres effrayants
Qui font, autour des cathédrales, hurler la pierre.

Puis d’une main plus calme, avec amour, cisèle
Les portiques, les ogives et les chapiteaux,
Fais courir de frêles et gracieuses dentelles
Au faîte des murs et le long des arceaux.

Répands à l’intérieur, sous les voûtes sonores,
Où palpitent de longs échos de chants divins,

Des étendards brodés de pourpre et d’or.
Sculpté en la grande nef un autel byzantin
Où trônera, le front paré d’un diadème
De pierreries resplendissant,
La Vierge douce et radieuse que j’aime,
Pour qui fumeront les encensoirs d’argent.

Et sur le calme azur, dans le campanile
Ciselé, ouvre comme un précieux joyau,
Tu feras gazouiller ainsi qu’un chœur d’oiseaux
Le carillon de ma folie.