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L’UNIVERSITÉ DE SANKORÉ

parfois dans sa maison de campagne à deux ou trois jours de la ville. Les branches d’enseignement étaient multiples, ainsi qu’on va voir. Des théologiens commentaient et analysaient les grands livres sacrés, enseignant l’art de la rhétorique : la logique, l’éloquence, la diction, afin de préparer l’étudiant à répandre la parole de Dieu et au besoin à soutenir des controverses. Des jurisconsultes exposaient la Loi suivant le rite malékite. Des stylistes apprenaient à écrire en termes ornés. D’autres professaient la grammaire, la prosodie, la lexicographie, la philologie, l’astronomie, et même l’ethnographie. Certains étaient très versés dans les traditions, les biographies, les annales et l’histoire des hommes. Seules les mathématiques ne paraissent pas avoir comporté un enseignement spécial. Quant à la médecine, l’empirisme le plus grossier se mêlait aux habituels préceptes hygiéniques de la thérapeutique arabe. Tel cheik nous est montré guérissant les maux de dents « avec un peu de terre de son jardin ». Il y a pire. « Un grand personnage ayant été atteint de la lèpre, les médecins vinrent de toutes parts pour le soigner. L’un d’eux dit : Il ne guérira que s’il mange le cœur d’un jeune homme. L’émir en fit tuer un sur-le-champ. Mais rien ne lui fit et il mourut des suites de sa maladie. »

Les études étaient fort longues : « Nous restâmes trois ans sur l’explication du Teshil de l’iman Malek, afin d’acquérir une connaissance parfaite des subtilités de la grammaire arabe », rapporte un écrivain tombouctien. En revanche, l’éducation physique était fort négligée. Au temps de Sunni Ali on empêchait même les enfants de Jouer et de se livrer aux exercices corporels. Aussi, quand les savants durent quitter Tombouctou, poursuivis par le tyran, « ils ne savaient comment s’y prendre pour monter sur un chameau et tombaient misérablement par terre ». Le jeu, à cette époque, était regardé comme digne des femmes seulement, et, ajoute l’auteur du Tarik, esprit libéral, on appelait jeu bien des choses !