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Page:Le Tour du monde - 14.djvu/23

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l’on y rencontre aussi fort rarement l’alouette, le rossignol ou quelque autre oiseau chanteur. Peut-être l’absence de parfums et de chants au milieu de toute cette richesse de végétation et de vie animale des campagnes japonaises contribue-t-elle à amoindrir l’effet qu’elles devraient exercer sur l’imagination. Il est certain que l’on n’éprouve pas, à les contempler, cette sorte d’attendrissement et de rêveuse exaltation que cause en Europe l’aspect d’un beau paysage à l’époque du réveil de la nature. Sans examiner d’ailleurs jusqu’à quel point notre sensibilité s’alimente de souvenirs d’enfance et d’idées traditionnelles qui ne sauraient trouver d’application dans le monde de l’extrême Orient, je présume qu’une chose encore peut contribuer à y refroidir notre enthousiasme, c’est que, pour ainsi dire, la nature y est trop cultivée.

Culture du riz. — Dessin de Émile Bayard d’après une peinture japonaise.


Excepté les forêts et autres plantations d’arbres que le gouvernement fait entretenir avec une louable sollicitude, tout le sol est envahi par les cultures, à un point dont je ne saurais mieux donner l’idée qu’en décrivant l’aspect d’une vallée des environs de la baie de Yédo.

Nous sommes en avril, et déjà la lisière des bois est bordée de champs de sarrasin en pleine floraison. Un peu plus bas, l’orge et le froment que l’on a semés en novembre tomberont dans quatre ou cinq semaines sous la faucille du moissonneur. Or, le blé étant semé au Japon comme on plante les pommes de terre en Europe, c’est-à-dire par bandes régulières, parfaitement alignées, il y a dans l’intervalle des deux sillons parallèles un espace libre où l’on voit déjà poindre une nouvelle culture : ce sont des fèves qui lèveront aussitôt que le champ aura été récolté.

Culture du riz. — Dessin de Emile Bayard d’après une peinture Japonaise.


Cette verte pelouse que l’on prendrait pour du blé en herbe, c’est un champ de millet qui a été ensemencé en mars et qui sera mûr en septembre. Le millet se consomme par les indigènes en plus grande quantité que le froment ; ils le réduisent en farine et en font des gâteaux ou de la bouillie.

Sur le plateau voisin, un campagnard laboure la terre au moyen d’une petite charrue attelée d’un seul cheval. Il déposera dans ce sol fertile de la graine de cotonnier, et déjà en septembre ou en octobre chaque grain de semence aura produit une plante de deux à trois pieds de hauteur, chargée d’une vingtaine de capsules arrivées à maturité. Quelques oiseaux blancs de la famille des échassiers, des cigognes ou des grues, semblent travail-