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Le dyke et les ruines d’Expaly. — Dessin de Thérond d’après une photographie.


VOYAGE AUX VOLCANS DE LA FRANCE CENTRALE,


PAR M. FERDINAND DE LANOYE[1].


1864. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


XIII


La Haute-Loire. Brioude et Saint-Julien. — Le pont de la Vieille-Brioude. — Changement de sol et de climat. — Fix et notre ami Joanne. — La Chaise-Dieu et George Sand. — Excursion sur la crête du Velay et dans les âges géologiques.

Partis d’Issoire à six heures du matin, nous remontons jusqu’à Arvant la voie ferrée que naguère nous avons descendue en venant du Cantal. Laissant alors à droite la ligne de Massiac pour suivre celle qui doit un jour relier les bassins charbonniers de Brassac et de Saint-Étienne, à travers la Haute-Loire, nous ne tardons pas à atteindre la gare de Brioude, où ce tronçon s’arrête aujourd’hui, au point même où on peut géologiquement fixer l’extrémité supérieure de la Limagne. Brioude, l’ancienne Brivas de Sidoine, de Grégoire de Tours et de la légende miraculeuse de Saint-Julien, est une agglomération de cinq mille et quelques cents âmes, assez tristement logées, et qui seraient non moins tristement nourries, s’il fallait en juger par le déjeuner que nous essayâmes de faire au buffet de la gare, et dans le menu duquel (solide ou liquide) des mouches de toutes tailles et de toutes couleurs entraient pour plus de moitié.

Résidence d’un sous-préfet, ni plus ni moins que tant d’autres cités de France, Brioude jouit en outre de l’avantage de montrer à l’étranger, sous des colonnes rondes et trapues, une source où la tradition légendaire veut que les bourreaux à la solde de Dioclétien aient lavé la tête du centurion Julianus, décollé pour la foi, et de posséder la tombe de ce soldat-martyr sous une des plus remarquables basiliques qu’ait élevées l’art chrétien des premiers siècles.

« Dans aucune église byzantine, dit M. Mérimée, on ne verra des sculptures plus fines, un travail plus soigné, une plus grande variété de motifs. Par leur composition, quelquefois même par leur exécution, plusieurs de ces chapiteaux se rapprochent tellement de l’antique, qu’ils justifient, jusqu’à un certain point, l’opinion de quelques antiquaires qui, dans l’édifice actuel, voudraient voir un monument du quatrième siècle. Sur un des chapiteaux de la nef, par exemple, un génie ailé tenant un thyrse, et monté sur un tigre, paraît une copie de quelque bas-relief enlevé à un temple de Bacchus. Plus loin, des griffons, buvant dans une coupe, rappellent un grand nombre de sculptures romaines. Toutefois, lorsqu’on examine attentivement ces imitations, la fantaisie byzantine, son caprice bizarre se révèlent bientôt dans les additions qui surchargent le type original. C’est ainsi que les tigres antiques, qui

  1. Suite et fin. — Voy. t. XIII, p. 65, 81, 97 ; t. XIV, p. 257 et 273.