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Page:Le Tour du monde - 63.djvu/342

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Le voyageur se rendant chez le gouverneur de Taïkou (voy. p. 344). — Composition d’A. Paris, d’après le texte.



VOYAGE EN CORÉE,

PAR M. CHARLES VARAT[1],
EXPLORATEUR CHARGÉ DE MISSIONS ETHNOGRAPHIQUES PAR LE MINISTÈRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE.
1888-1889. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


IV

Ascension de la crête de la chaîne centrale. — Grande muraille et porte fortifiée. — Échange de monnaie. — Descente du Song-na-san. — Une place forte. — Les brigands. — Exploration purement scientifique et expédition militaire. — Cotonniers. — Convoyeur. — Mât de lettré. — À vol d’oiseau. — Fleuves et rivières. — Pêche. — Anthropologie infantile. — Poulaillers. — Campement forain. — Mort-vivant. — Monuments commémoratifs. — Une auberge suburbaine. — Taïkou. — Réception du gouverneur. — La ville. — Une fête coréenne. — Le départ. — Singulier effet de trompettes. — Tchang-to. — La fleur des champs brille à ma boutonnière ! — La pluie. — Mil-yang architectural.


Après deux jours de montée à travers les contreforts de la chaîne centrale, nous atteignons enfin le carrefour de la croix, le King-pang-tcha-nadri, village situé à la base du dernier col du Song-na-san. Là on me dit qu’il faut faire décharger les chevaux et louer des hommes pour porter à dos notre bagage, tant cette dernière crête est difficile à franchir, par suite de la raideur des pentes et des effroyables rochers qui les couvrent. Je m’oppose d’abord à cette désorganisation de la caravane. Mais mon interprète a de terribles renseignements au sujet de ce passage : jamais, m’assure-t-il, mandarin ne l’a franchi autrement qu’en palanquin, et si je fais la route à pied, je perdrai une grande partie de mon prestige aux yeux de mes hommes, en privant de leur rémunération les habitants du village, dont le portage est, pour ainsi dire, l’unique ressource.

Je dois donc monter dans une chaise à porteurs des plus rustiques ; dix hommes la soulèvent, nous commençons l’ascension. À peine parti, je comprends l’insistance de Ni, en le voyant installé lui-même dans un palanquin. Son rêve, depuis le commencement du voyage, est enfin réalisé. Il faut pourtant reconnaître que jamais nous n’avons eu une route aussi épouvantable. Je m’assieds d’abord à l’européenne et laisse pendre mes jambes hors de la chaise, mais je dois bientôt les rentrer dans l’intérieur et les croiser sous moi à la coréenne, pour qu’elles ne soient pas brisées par les nombreuses roches au-dessus desquelles mes porteurs m’entraînent rapidement. Eux-mêmes évitent

  1. Suite. — Voyez p. 289, 305 et 321.