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Les huguenots, après avoir pillé la basilique, tentèrent de détruire le saint corps par le feu. Mais il résista aux flammes. Les hallebardes et un marteau de forgeron dont on le frappa à coups redoublés le brisèrent, et un sang vermeil s’en échappa.

Les chanoines, après le départ des sacrilèges, recueillirent les ossements du saint patron et les exposèrent dans un reliquaire en bois doré, où ils sont encore.

D’autres sanctuaires méritent d’être visités dans l’enceinte du pèlerinage, mais leur importance est moindre à tous égards. La chapelle Sainte-Anne et Saint-Joachim a été entièrement reconstruite dans le style du xve siècle. Son portail a été pris dans les ruines d’une magnifique abbaye fondée par les seigneurs de Themines.

La chapelle de Saint-Blaise, d’architecture romane, la chapelle Saint-Jean-Baptiste, fondée en 1516 par Jean de Valon, chevalier de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem et entièrement reconstruite, n’offrent qu’un intérêt secondaire.

Nous ne les décrirons pas ; et, suivant un chemin de croix sur les flancs de la ravine, nous arriverons au château, antique forteresse crénelée, ceinte de remparts, construite aux xiie, xive et xve siècles pour servir de citadelle au bourg et protéger soit les églises, soit les couvents.

Cette fière construction couronne le rocher contre lequel s’accrochent les sanctuaires et le village. Un château gracieux et de formes élégantes a été bâti à l’abri des remparts par le R. P. Caillau, de la Société des missionnaires de France, en témoignage de reconnaissance. pour la guérison miraculeuse d’une maladie dont il fut atteint.

Les bords de l’Ouysse (voy. p. 414).

De cette hauteur, la vue est superbe. L’œil plonge jusqu’au fond d’une étroite vallée de 150 mètres de profondeur, enserrée de chaque côté par une muraille de rochers à pic blancs ou livides. C’est le long de la muraille de la rive droite, sous mes pieds, que semblent grimper les uns au-dessus des autres les divers sanctuaires et les habitations.

— Les deux journées que je consacrai à visiter Rocamadour, les sanctuaires et la vallée furent, malgré la saison tardive, favorisés par le soleil. Puis l’apparition des gelées blanches refroidit subitement le temps. L’hiver annonçait son retour prochain, et, malgré l’éclat du ciel, on frissonnait déjà un peu, matin et soir, sous son manteau.

Il fallait se hâter et profiter des derniers beaux jours pour parcourir les environs. J’acceptai donc avec empressement l’offre que me fit l’excellent maître de l’hôtel de m’emmener dans ses propriétés, où sont enclavés les gouffres de l’Ouysse, qui vomissent deux sources considérables, ou plutôt deux véritables rivières.

Aux premières heures du jour nous allons sur la route à travers l’aride plateau dont les bois maigres et quelques demeures perdues rompent l’uniformité. Nous suivons la crête de la falaise qui abrite Rocamadour, longeant ainsi la profonde déchirure où serpente le lit altéré de l’Alzou, qu’enserre toujours la double muraille rocheuse.