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Le Gymnase était ouvert : on y jouait Le Fils de Famille. J’y entrai. Devant une salle presque vide, c’était d’une navrante ironie de voir évoluer, sur la scène, les fantoches de notre armée, d’entendre leurs couplets chauvins qui sonnaient si faux en cette heure de détresse et d’affolement. Je ne restai que quelques instants.

Le lendemain était un dimanche. Une pluie fine, un jour triste et sombre semblaient à l’unisson de l’abattement qui planait sur la ville. Les magasins fermés, les pavés glissants, les rues presque vides augmentaient encore cette impression. Des poseurs d’affiches, le pot de colle en main, une légère échelle sur l’épaule, accomplissaient silencieusement leur fatale besogne, puis se sauvaient en courant, comme honteux de ce qu’ils venaient de faire. Les passants émus se précipitaient, et voici ce qu’ils lisaient :

— L’armée se replie sur Châlons.