Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 43.djvu/851

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’instrumens agricoles, l’usage des machines se répand de plus en plus ; les charrues en fer se multiplient, ainsi que les moissonneuses, les vanneuses, les arroseuses. Les herses, qui n’étaient que 5 353 en 1899, étaient déjà 38 080 en 1902, indice du soin nouveau que les paysans bulgares apportent à ce que notre vieil Olivier de Serres appelait si joliment le « ménage des champs. »

L’État bulgare s’est beaucoup préoccupé de protéger les paysans contre l’usure, fléau des classes agricoles en progrès. L’instinct du paysan le porte à acheter la terre, mais il est souvent victime des races dont la vocation est de servir d’intermédiaires : levantins, grecs, juifs, arméniens. Les juifs sont beaucoup moins nombreux en Bulgarie qu’en Roumanie ou en Russie ; on n’en compte guère que 30 000, répartis surtout dans les villes de la Mer-Noire et de la Roumélie. Un réseau d’institutions de crédit et de coopération, dont l’État a pris l’initiative, protège le cultivateur contre lui-même et contre les usuriers. La Banque agricole, dont l’origine première remonte à 1863 et à l’administration bienfaisante de Midhat-Pacha, a été réorganisée par une loi du 23 décembre 1894, dont M. Ivan Guéchoff a été le promoteur ; elle administre 160 caisses rurales qui mettent, jusque dans les bourgs des campagnes, le crédit à la portée des ruraux ; dans les villes où la banque nationale n’a pas de succursale, ces caisses sont autorisées à la représenter et à faire des opérations pour elle. Elles font des prêts sur hypothèques ou sur gages, à des taux relativement modérés, 7 et 8 pour 100, avancent des fonds aux cultivateurs pour achat de bétail, semences, instrumens aratoires, reçoivent des dépôts, etc. ; elles sont, en outre, autorisées à faire des avances aux sociétés coopératives du type Raiffeisen et l’on a vu, depuis le commencement de ce siècle, cette forme de la prévoyance sociale se développer étrangement. A la fin de 1907, la Bulgarie comptait 293 sociétés de crédit coopératives dont le bilan s’élevait, au 30 septembre, à 4 741 609 francs. Une loi récente a créé une institution analogue au homestead qui réserve aux paysans un noyau insaisissable et incessible de propriété.

L’élevage va de pair avec la culture des céréales : c’est, comme disait Sully, la « seconde mamelle » de la Bulgarie. La diminution des jachères ayant amoindri les surfaces livrées à la pâture, le gouvernement se préoccupe de développer la culture des fourrages artificiels ; tous les terrains semés en luzerne sont