La Tour d’amour/12

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Georges Crès et Cie (p. 239-260).
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XII


Encore un cauchemar ! que je pensais durant des semaines.

Mais la disparition de mon béret me tourmentait. J’avais perdu mon béret dans ma course à travers les rues chaudes de la basse ville de Brest, et puérilement, limant toujours le bouton de ma veste, je songeais qu’il me faudrait en racheter un autre ou… voir revenir l’ancien chez nous, rapporté par la police. Ça, c’était une preuve contre moi.

Je n’avais probablement tué personne. Les filles sont habituées aux coups de couteau des galants de la mer…

Celle-là vous embrassait comme la petite Marie, (Encore un rêve ? Comment la petite Marie, ma promise, aurait-elle pu se transformer en fille pour…)

Je ne ressentais ni chagrin, ni remords. Je ne pensais, ni n’agissais plus de mon plein consentement.

Puis, j’étais pris de boisson, cette nuit-là…

Mon béret ne revint jamais.

J’en fis acheter un autre.

Et des semaines, des semaines coulèrent, des mois. Noël, Pâques, l’Ascension, l’Assomption. Je n’entendais point leurs cloches.

Le Saint-Christophe passait, sifflait son appel à la vie devant la maison de la mort.

Je ne répondais pas, las d’essayer de vivre.

Nous demeurions les deux ours en cage, le vieux et moi, parlant juste pour le besoin du service, nous cachant nos manies secrètes, lui, déclinant peu à peu vers sa fin, car il n’étudiait même plus l’alphabet, moi farouchement reconquis par d’infernales habitudes.

On mangeait, on buvait, se remontant comme des horloges tous les matins, excellentes mécaniques de l’aurore au crépuscule, et se détraquant toutes les nuits, après les premiers jets de feu du phare.

On faisait son devoir d’éclairer le monde… en aveugles.

Le devoir, c’est une manie, la plus terrible des manies, car on a confiance en elle. On s’imagine qu’elle vous sauvera.

La conscience de mon crime ne me rentra au ventre que le jour où le vieux chut sur l’esplanade, terrassé par un mal singulier.

Il fumait sa pipe tout debout, le dos contre la muraille du phare, les pieds se mouillant dans l’écume qui déferlait rageusement jusqu’à lui.

Moi, je mâchais du tabac, assis sur le parapet du côté nord, et je le regardais comme étonné de le voir si grand.

Depuis que je ne lui adressais plus la parole que dans les occasions solennelles et que j’avais réparé seul notre brèche de la cinquième meurtrière, moyennant le ciment envoyé du Saint-Christophe, il semblait me conserver rancune.

Mais il restait toujours vaillant à la besogne, les temps de bourrasques ; d’ailleurs, il m’avait garé du vent le soir du navire en perdition… et on s’estimait.

…Quel navire ? Je ne me souvenais pas bien.

Tous les navires se perdaient par chez nous. Nous habitions la Tour d’Amour !

Mathurin Barnabas était grand, maigre et grand comme le phare, il ne se voûtait que pour flairer les épaves.

Sa figure blafarde, son nez camard, ses yeux sanglants qui pleuraient, maintenant, des espèces de glaires lumineuses, son haut front chauve, lui donnaient l’aspect d’un fantôme de chrétien, un matelot péri au loin qui revenait pour torturer les autres, car on l’avait dû faire sombrer trop tôt, un boulet aux chevilles, histoire de s’en débarrasser.

Il fumait, crachotant le long de ses habits tellement sales, tellement déchirés qu’on respirait, près de lui, une odeur affreuse.

Il puait le cimetière.

Moi, je continuais à me tenir propre. (Peut-être bien que je m’aimais encore un brin.) Lui ne s’aimait plus, n’aimait plus ses compagnons, n’aimait plus les noyées. Il guettait seulement la venue de la dernière marée… celle qui apporte le dernier navire pour le dernier voyage entre les quatre planches. Je calculais qu’il pouvait bien avoir la soixantaine.

— Peut-être ben que oui ! Peut-être ben que non ! m’aurait-il répondu, s’il avait su encore parler.

Mais il ne proférait plus que des sons bizarres, des grognements de porc sauvage qu’on ne comprenait guère, s’il ne les accentuait d’un geste.

Il fumait…

Tout à coup il s’abattit, le front en avant, sur les dalles de l’esplanade toujours glissantes, et il allait gagner le large.

— Père Mathurin ! Eh ! père Barnabas !…

Je le relevai, le prenant à bras le corps. Je le trouvai lourd comme du plomb.

Ses jambes ne remuaient pas, tendues, tirées par des cordes invisibles, ses bras mous ballottaient autour de son corps, n’essayant pas de chercher un appui. Seule, sa tête vivait, et ses yeux, ses pauvres yeux abominables, lancèrent une lueur verte.

— La barque ! dit-il distinctement.

— Quelle barque, père Mathurin ?

Moi aussi j’avais maintenant envie de parler.

Je tremblais de tous mes membres.

Je l’accolai au parapet, je courus chercher une fiole d’eau-de-vie et je le fis boire.

Ses dents, très serrées, brisèrent le goulot de cette bouteille, il avala autant de verre cassé que de liqueur.

— Voyons, père Barnabas, faut pas se laisser crever sans les sacrements… Le Saint-Christophe est venu hier… il ne repassera que dans quinze jours. Que diable… vous m’entendez, hein ?

Il fit signe que oui, hocha la tête et eut, cela m’étonna, son rire cynique des temps d’orage.

Jusqu’au soir je m’évertuai à lui ranimer les jambes. C’était pis que des morceaux de bois.

La paralysie, probablement.

J’avais encore de l’espoir, rapport à la tête qui continuait à virer sur son cou. Je lui enfonçai sa casquette, le recouvris de sa vieille couverture de lit sentant l’huile de poisson, et je le quittai, une heure, pour allumer les lampes là-haut.

En montant la spirale, mon cœur battait fort. Je me souvenais de sa phrase :

— Souhaite, le Maleux, que je ne meure point durant l’été, après le passage du ravitailleur…

Et je me rappelais aussi sa drôle de recommandation de t’arroser d’alcool.

Enfin, quoi, il n’allait pas pourrir quinze jours à côté de moi, lui qui pourrissait déjà au fond du charnier de son âme depuis tant d’années ?…

Ah ! bien non, je le jetterais plutôt dans l’océan.

Cas de force majeure, n’est-ce pas ?

À la mer comme à la mer !

Lorsque je redescendis, je le retrouvai couché, bien sage, ne remuant ni pieds ni doigts.

Ses yeux se fixèrent sur les miens, affectueusement, d’une couleur toute tendre, il me dit, d’un accent que je ne lui avais jamais entendu :

— Mon pauvre Jean, je suis fini.

Ce fut comme si mon père, mon vrai père, me parlait.

Je me mis à genoux près de lui, pleurant et oubliant mes réflexions égoïstes.

— Ben non, c’est pas une raison, l’ancien, pour vous effrayer, vos jambes vont vous revenir. On n’est pas fini pour une chute, un simple étourdissement. À votre âge… on se frappe, mais… quoi, je suis là pour vous soigner… On ne se parle guère… mais on se comprend, mon pauvre vieux. Le malheur nous tient depuis longtemps les mains l’une dans l’autre.

Il essaya de se remuer, retomba, râcla la pierre de ses ongles et du bout de ses bottes.

— Faut me mettre sur mon lit, mon gars, dit-il de sa voix de plus en plus claire, et me frotter avec du pétrole. Un bon remède. Faut tout essayer. Je tiens point à te laisser dans l’embarras, le Maleux.

Il songeait à mon embarras, tout près de sa propre mort.

Je fus si touché que mes larmes ruisselèrent.

Mon cœur crevait avec lui.

Dame, on avait vécu bientôt six ans ensemble.

Ennemis ? Non ! Seulement étrangers.

— Père Mathurin, dites-moi ce qu’il faut faire. Je vous obéirai.

Je le traînai, ce grand cadavre qui causait, retrouvant la vie de la raison, et je le plaçai sur sa couchette, en face de notre foyer.

Il voulut boire, je lui offris du vin.

— Non, fit-il, donne-moi de l’eau…

Il en but deux gorgées.

— Elle est amère, l’eau, murmura-t-il. Est-ce qu’elle est toujours comme ça ici ?

Lui n’en buvait jamais.

— Elle est douce, père Mathurin… d’ordinaire. Voulez-vous du sucre ?

— Non, merci.

Et ses yeux se fermèrent un instant.

Il avait dit : merci ! Je ne savais plus quoi inventer pour le remercier à mon tour de se montrer brave homme.

Ce n’était pas sa faute s’il était si sale.

Ce n’était pas sa faute s’il était si méchant.

Quelque chose avait dû passer sur lui, l’éteignant, et glaçant la meilleure vigueur de son sang.

Le pauvre…

Son grand corps, étendu au milieu de notre salle basse, paraissait s’écraser sous l’énorme colonne du phare.

On l’avait muré là, et il portait le lourd flambeau de toute la dernière force de sa poitrine d’homme.

Maintenant ma poitrine, plus jeune, allait remplacer la sienne, et je sentais déjà le fardeau m’accabler, sans d’ailleurs aucune idée de me soustraire à ce devoir.

Quand on reste longtemps à la même place, on aime l’endroit où l’on souffre. C’est plus naturel que de chercher le bonheur.

Je pensai qu’il voulait dormir et je vins bourrer une pipe sur l’esplanade.

Il faisait une belle soirée d’automne, en supposant qu’on puisse dire que la mer est belle quand elle est rouge, toute teintée par le soleil couchant, comme par la fureur d’un incendie. Les vagues ondulaient, grosses, opulentes, dans un tel luxe de soieries et de bijoux qu’elles offensaient notre misère. Ah ! les gueuses, les gueuses ! Tous leurs petits ronrons de chatte, leurs cris de lionnes enragées, leurs danses de comédiennes et, pour finir, les torrents de sang et de larmes ruisselant autour d’elles sans paraître les salir. Belles de toutes les libertés que les hommes prisonniers de leurs volontés sont obligés d’admirer de loin !

On veille sur elles et elles avalent les grands navires ; on leur confie sa destinée, et elles vous noient entre leurs seins mouvants.

Cela jouait, se poursuivait, hurlait des mots obscènes, ou chantait des cantiques, mais cela, par-dessus tout, vivait de la mort des autres.

Une odeur de marée entrait chez nous avec le vent pur, une odeur impure, âcre, gerçant les lèvres qui en goûtaient la saveur excitante, fendant la peau de rides précoces, emplissant les regards du sel dont on fabrique les larmes de désespoir.

La mer était belle, la mer dansait au soleil couchant, et relevait sur les marches de l’escalier du phare ses franges d’écume comme une fille exhibe son linge.

Bientôt nous aurions besoin de linge, en effet, et je pensais que nous ne possédions point de drap neuf pour un linceul décent.

— Le Maleux ?

Je me retournai.

Le père Barnabas s’était presque dressé sur son lit. Il devenait plus pâle, et ses yeux se creusaient horriblement dans sa face livide.

— Jean, tu es un bon compagnon, quoique ben jeune pour tolérer ça… Jean, faut tout prévoir… Je peux sombrer… Je sens plus mes genoux… tâte voir le cœur… Est-ce que ça bat toujours ?

Je lui touchai la poitrine.

— Vous êtes fou, l’ancien. On ne meurt point d’une attaque… il en faut trois. D’ailleurs, je vais mettre un pavillon en berne et si une barque…

Il tressaillit douloureusement.

— La barque ! La barque ! répéta-t-il.

— Quelle barque, père Mathurin ?

Il se penchait pour regarder la mer, semblant guetter réellement une voile.

La mer dansante ne faisait danser personne.

— V’là que ça le reprend ! soupirai-je.

Je le veillai, immobile à côté de lui, les bras croisés.

C’était l’agonie qui arrivait. Il ne verrait point la troisième attaque, et je resterais en tête à tête avec un cadavre, cette fois, tout à fait mort.

Quinze jours… sans pouvoir l’enterrer !

— Mon Dieu, dis-je tout haut, protégez-nous !

Dieu nous protégeait visiblement, car il nous faisait grâce de la tempête. Là-haut, les lampes flambaient tranquillement, durant que le gardien-chef coulait sa dernière huile.

Vers minuit, comme je descendais de la lanterne, le vieux me sembla presque bien. Ses yeux se remirent à me chercher, et sa voix s’adoucit :

— Est-ce que ce serait de bonne amitié que tu me rendrais un service, le Maleux ?

Je m’assis sur son lit, et je dis oui, du front.

— T’auras pas peur ?

— J’ai plus peur de rien, déclarai-je d’un ton résolu.

— Alors… va me la chercher…

Je fus debout, tout de suite, et je m’écriai :

— Qui ? La femme ?

— Oui, la femme, puisque tu l’as vue…

Je frissonnais de tout mon corps. Il n’était pas fou… je n’étais pas fou…

Nous avions tué chacun une femme que nous aimions, étant ivres, ou d’amour ou de vin…

Mon crime, demeuré enseveli au fond de ma conscience, ressuscitait, et je retrouvais la preuve du mien avec la certitude du sien.

— Père Barnabas… excusez-moi… j’ai cru voir sa tête… un jour d’y a longtemps, derrière la vitre d’une des meurtrières…

— Tu es jeune… tu ne comprendras pas… c’est des appétits de vieux, et puis… autrefois… la vivante… elle m’avait fait cocu… J’ai jamais pu aimer que celle-là, par orgueil… Faut aller me la chercher, et tu la jetteras dans la mer quand je serai fini.

Il m’indiqua la poche de cuir de sa ceinture, qui ne le quittait jamais. J’y puisai une clé toute chaude encore du contact de sa chair.

Il me fit un signe.

Mais j’étais déjà parti. Je savais bien le chemin.

Je montai, m’appuyant au mur, suffoquant et tendant ma lampe bien en avant comme pour me défendre.

Vers la moitié de l’escalier, je m’arrêtai contre la porte mystérieuse.

Oh ! pas plus mystérieuse que les cinq portes aux cinq étages de la tour.

Je posai ma lampe et j’introduisis la clé. Ça s’ouvrit très doucement.

…De la poussière, un peu de sable, de ce sable fin qui pénètre partout, si blanc, si fluide. Pas de femme ! Aucun cadavre, aucun squelette ; seulement, sur l’appui de la fenêtre, juste devant la loupe de verre, voilée d’une buée verte, une étrange plante dans un pot de cristal, un large pot où l’on met des gros fruits à confire… et les poisons, chez les pharmaciens.

Cette plante s’étalait autour du pot en luxuriants rameaux blonds, était onctueuse au toucher, très pareille à des cheveux.

Retournant le bocal, je vis la tête osciller légèrement, et ses yeux vides s’emplirent de lueurs, s’irisant à travers l’alcool.

Je jetai ma veste sur elle, pour ne plus rencontrer ses yeux en l’emportant.

…Le vieux caressa, de ses larges pinces de crabe, cette chevelure fusant d’une rondelle de liège, en cascades légères, puis il dit, très distinctement, durant que je me cachai la figure dans ses draps :

— Ben quoi, petit ? Fais pas l’enfant !… Elle a été belle… je t’en réponds, elle ne l’est plus… mais c’est que tu n’as pas connu son corps… Aucune autre créature n’a été si bonne pour moi, le pauvre bougre abandonné… elle est venue comme un ange quand je me rongeais les sangs attendant la marée montante. Elle est venue suivant une barque chavirée… morte à peine depuis deux jours, pas enflée, pas verdie, toute jeune la pauvre garce… et vierge… une demoiselle riche. Elle était accrochée par ses cheveux au gouvernail de la barque… des cheveux plus blonds, plus épais… (je lui en ai pris deux touffes près des oreilles, je les aimais tant…) Ils avaient encore un parfum de fleur… des fleurs de la terre… je l’ai gardée une lune… puis j’ai coupé la tête… pour mon dessert d’amour. Oui, bien bonne, bien douce, bien complaisante ! Cependant, elle m’a fait tuer quelqu’un, celui d’avant toi, un garçon sensible qui, rien que de l’avoir aperçue, s’est suicidé. Il s’est guéri, quoi ! Maintenant… faut la rendre à l’Océan. Car… je suis jaloux. Va !…

Je me relevai ; tout courant, j’allai précipiter cela du haut des escaliers de l’esplanade. Le bocal se brisa, rendant un son sinistre de vitre éclatant sous un poing, et la tête, enfin libre, sombra au plus profond des abîmes.

Quand je rentrai, le vieux riait d’un rire presque paisible, ses puissantes mains posées bien à plat sur sa poitrine, et il ne respirait plus.

Lui aussi était guéri !

Je récitai la prière des morts que tous les gens de mer, qu’ils croient en Dieu ou qu’ils se donnent au diable, savent par cœur.

Je récitai la prière des morts dans ma grande solitude peuplée de fantômes…

…Au bout de trois jours, je l’arrosai de pétrole.

…Le cinquième jour, je l’entourai de tous ses habits, et je le cousis dans ses draps hermétiquement.

…Vers le huitième jour, ne mangeant plus, ne buvant plus, je m’enfermai chez moi, je bouchai la porte de l’escalier, et je passai le temps au soleil, sur le chemin de ronde.

Mais il fallut descendre pour chercher des provisions de torches, en cas de grain.

Le long de la spirale, c’était comme l’haleine de la peste.

Le courage me manqua. J’eus l’idée sacrilège de le lancer à l’eau, bourré de limailles et de plomb.

Non ! Je ne devais pas… il avait encore bien besoin de prière. Je ne devais pas…

Je l’exposai, comme un ballot, dans le coin nord de l’esplanade.

Ce supplice dura les quinze jours prescrits.

Des vers grouillaient, gras de graisse humaine, sur le ballot…

— Navire !…

Je hurle, je saute d’impatience.

C’est le Saint-Christophe.

On m’envoie un camarade, le remplaçant des jours de sorties.

Et les autorités débarquent : un officier tout galonné, l’air sérieux, le commandant, le médecin et le prêtre.

Le palan les amène un à un, d’abord comme des petits pantins ridicules, ensuite, les pieds sur les dalles du phare, plus grands, plus solennels.

Toutes ces figures de compassion m’émeuvent, et j’ôte mon béret, bien honnêtement.

Je suis un criminel devant ses juges.

Je m’explique et je pleure.

— Allons ! allons ! le Maleux, fait l’officier, vous êtes un brave garçon… vous avez eu du courage… oui… une terrible situation quinze jours au large, sans un aide… Vous serez récompensé !…

Il parle pendant une heure. Les oreilles me saignent. Il nous réunit autour de ce ballot qui pue et nous apprend que ce fut un homme…

— Trente ans de services ! Un luron, mes amis. Que Dieu ait son âme. Vous, le Maleux, vous voilà gardien-chef.

Le curé s’agenouille.

Nous pleurons tous.

Et ils s’en vont, d’abord solennels, ensuite petits pantins pendus au bout du fil de la providence.

— Ho ! hisse ! hisse en haut !

Nous halons ferme, mon aide et moi, ragaillardis un peu par une goutte bue et trinquée avec les patrons.

Je suis nommé gardien-chef.

Marie, ma chère petite Marie…

Devant Dieu, s’il m’écoute, je jure de ne jamais revoir la terre.