Le Fils d’Ugolin/10

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Calmann-Lévy éditeurs (p. 108-114).
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X

Durant les vacances au château de Kerzambuc, Hyacinthe Arbrissel fonça sur son fils comme un oiseau de proie. Sans doute se reprochait-il d’avoir — pour d’autres — laissé se relâcher des liens tissés si étroitement entre ce fils et lui. Un besoin irrésistible de le dominer, de l’acquérir tout entier, dirigea dès lors ses desseins, ses mouvements. Instinctivement il manœuvrait pour ne pas le quitter. Parfois le matin, dès sept heures, Annie voyait ce mari, paresseux d’ordinaire, enfiler sa robe de chambre et se précipiter au carreau de la fenêtre comme pour savoir qui faisait ainsi grincer la grille du parc. « C’est Pierre qui s’en va entendre la messe au village », disait-il avec un air d’amant trahi. Alors il élaborait un programme de journée qui l’accrochât plus intimement à cet être qu’il sentait fuir. Il fit réparer le cabriolet du grand-père Arbrissel par le charron du village, et tous les jours désormais il emmenait ce jeune mystique parmi les chemins creux bordés d’ajonc vert bronze, aux jaunes fleurs. Ils parlaient peu. Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/119 Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/120 Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/121 Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/122 Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/123

— Si, écoute : je vais te dire. Tu es trop grand pour que je te brise le cœur. Je n’entrerai pas chez les Dominicains. Je ferai mon droit… comme tout le monde, et préparerai le barreau.