Le Tour de France d’un petit Parisien/1/2

La bibliothèque libre.
Librairie illustrée (p. 54-63).

II

L’Orphelin

Il est indispensable de faire ici un retour sur les années écoulées depuis le moment où Jean, suivant les troupes au campement de la Délivrance, traversait les lignes prussiennes jusqu’à Dôle, dans le Jura. Que d’événements s’étaient produits !…

Avant même la fin de l’armistice, le brave charpentier, reprenant ses outils, s’établit d’abord à Dijon, ville toute frémissante encore des chocs de la guerre, occupée tour à tour qu’elle avait été par les Badois de Werder et les Chemises Rouges de Garibaldi.

Aussitôt que les communications furent rétablies, il écrivit au maire de Vannes-le-Châtel pour s’enquérir de la famille de Jean Risler, ou plutôt de cette tante Jacqueline et de ce père Barnabé à qui l’enfant avait été confié pendant quelques jours…

Bordelais la Rose apprit, peu après, que le vieux luthier des Vosges avait été jeté en prison par les Prussiens, sous l’inculpation de détention d’armes. Le malheureux se trouvait encore enfermé à Mirecourt ; on ne savait ce que sa femme était devenue.

Alors l’excellent Bordelais la Rose se décida à conduire à Paris cet enfant qu’il traitait déjà comme s’il l’eût adopté. Les renseignements sur la mère de Jean manquaient et lui faisaient vivement regretter ceux que le père Barnabé aurait pu fournir. Il fallut au charpentier beaucoup de patience et beaucoup de dévouement pour utiliser les vagues indications données par le petit Jean et arriver enfin, rue Marie-Stuart, au domicile de la mère et de la grand’mère du jeune garçon : c’était la maison où était né Jean.

Mais les deux pauvres femmes étaient mortes pendant le siège ; la mère de Jean soignant sa mère à elle, déjà malade au moment de l’investissement de Paris, ne réussit pas à la sauver, et succomba quelques semaines plus tard aux atteintes d’un mal contagieux.

On sait que Jean avait une sœur un peu plus jeune que lui. La petite Pauline avait été recueillie par son oncle Antoine Blaisot, frère de sa mère, ouvrier ébéniste dont on indiqua la demeure au charpentier bordelais ; c’était dans la rue du Faubourg-Saint-Antoine.

Bordelais la Rose mena Jean à son oncle, qui fut enchanté de le voir vivant : déjà la grand’mère, — l’autre grand’mère, celle de Lorraine, — envoyait du pays des lettres désolées. À toutes ses questions, Antoine n’avait pu répondre d’une manière positive qu’en annonçant à la vieille Lorraine la mort de sa bru ; de Jacob Risler et du petit Jean il ne savait absolument rien. La grand’mère réclamait Pauline. L’oncle Antoine, qui était veuf, résolut tout de suite de rendre sans tarder à la bonne dame et Pauline et Jean, et il s’en expliqua avec Bordelais la Rose.

L’ancien zouave pensait avoir rempli convenablement sa tâche ; il dit adieu au petit Jean, l’embrassa tendrement, et lui fit promettre de lui écrire souvent, « lorsqu’il serait grand et qu’il manierait une plume ». Ses lettres le trouveraient toujours à Mérignac, près de Bordeaux, où il comptait se retirer dans une vigne dont il avait hérité quelques mois avant la déclaration de guerre.

Jean et Pauline furent conduits par leur oncle au Niderhoff. Ce fut avec une joie douloureuse que la vieille grand’mère rentra en possession des deux enfants de son fils. Pendant un temps, la bonne femme s’attacha ardemment à croire que Jacob, fait prisonnier, vivait encore dans quelque prison d’Allemagne, — ou, blessé, dans quelque hôpital ; mais les prisonniers revinrent, les blessés revinrent à leur tour, et tout espoir s’évanouit.

Toutefois Jacob avait été pleuré déjà ; il ne le fut pas de nouveau. Une préoccupation absorbait la vieille Lorraine : quitter le village que les Prussiens avaient acquis le droit de garder pour toujours.

Elle ne voulait pas que son petit Jean fût Allemand, et dans les derniers jours de septembre 1872, au moment où allait expirer le dernier délai accordé à ceux qui refusaient d’opter pour la nationalité étrangère, la vieille Gertrude, aidée de ses voisins et des cousins Risler, — le mari et la femme, — chargea sur une charrette tout ce qu’elle pouvait emporter, et emmena son petit-fils à Dommartin, près Toul, par des routes encombrées d’un peuple
Où est-il ce misérable ? répétait Jean (voir texte).
d’émigrants qui venaient — lamentable et touchant spectacle ! — jusque du fond de l’Alsace. La petite Pauline était très souffrante au moment où s’effectuait cet exode dans les montagnes des Vosges et les campagnes des bords du Rhin abandonnées à l’ennemi comme rançon. Quelque répugnance qu’elle y eût, la maman Gertrude dut confier l’enfant aux Risler ; — qui restaient sans hésitation dans le pays. — Ceux-ci se montrèrent assez bien disposés, empressés même, et du même coup, en gens pratiques, ils prirent aussi possession de la maisonnette de la bonne vieille et du jardin potager bien préférables à la chaumière en mauvais terrain qu’ils possédaient tout au bout du village.

La grand’mère de Pauline comptait bien rappeler auprès d’elle la fillette dès qu’elle serait en état de supporter le voyage ; mais il arriva, dans ces temps où tous les malheurs se succédaient sans relâche, que la pauvre mère Gertrude s’éteignit tout à coup : épuisée par ce dernier effort accompli en arrachant à l’étranger l’enfant de son nom et de son sang, et douloureusement atteinte par le deuil de quitter ce coin de terre française. Elle y était née, et rien, semblait-il, ne pouvait la priver de la triste douceur d’y mourir…

De braves gens de Dommartin écrivirent alors à l’oncle Antoine. Toujours rempli de bonne volonté, l’ouvrier ébéniste vint chercher Jean — deux fois orphelin. Jean revint à Paris avec son oncle. Il entrait alors dans sa neuvième année.

À cet âge, les chagrins n’ont guère de prise… L’enfant eut donc un moment d’épanouissement. Sa robustesse, ses bonnes couleurs firent sensation dans le faubourg populeux, où les gamins du même âge semblaient chétifs auprès de lui. Pendant six mois il fut pour tout le quartier « l’Alsacien qui ne voulait pas être Allemand », — et on le fêtait. Au bout de l’année, grâce à sa gentillesse et n’étant plus trahi par la fraîcheur de ses joues, Jean prenait droit de cité et s’élevait sans opposition à la situation privilégiée de gamin de Paris, à laquelle lui donnaient déjà des titres surabondants, sa naissance dans la grande ville et sa lignée maternelle.

Ce qui facilita, du reste, cette évolution, c’est qu’il se défendait volontiers, — on n’aurait pu dire pourquoi, — d’appartenir aux provinces perdues ; ce n’était là ni répugnance, ni fantaisie puérile ; il y avait une raison autrement sérieuse à cela ; le pauvre petit avait été témoin d’une odieuse scène faite à sa grand’mère par le brutal Jacob Risler, et qui s’était terminée par la soustraction de ce brevet et de cette croix qui constituaient un titre d’orgueil et une relique sacrée aux yeux de la mère Gertrude et de son petit-fils. — On sait déjà quelque chose de cette scène.

Or, l’enfant avait retenu quelques-unes des expressions injurieuses prononcées contre son père. Un doute affreux avait germé dans son esprit. Quelques mois plus tard, lorsque sa pauvre grand’mère l’adjura de ne rien croire de ce qu’avait dit Risler son mauvais parent, ce doute se dissipa ; mais à mesure que s’effaçait le souvenir des paroles de la bonne-maman, l’impression pénible de la scène revenait vivace et douloureuse à l’esprit de l’enfant. Il se rappelait alors certaines allusions cruelles des habitants du Niderhoff. Et il lui semblait, à mesure qu’il prenait de l’âge, qu’une tache déshonorait son nom.

Plusieurs fois Jean avait cherché à tirer quelque lumière de son oncle Antoine ; mais le brave homme, assez borné d’esprit du reste, n’aimait pas les Alsaciens. Son neveu était Lorrain ; mais pour lui Alsacien ou Lorrain c’était tout un. L’ouvrier ébéniste, profondément Parisien, — on pourrait dire Parisien endurci, — avait vu avec déplaisir sa sœur devenir la femme de Jacob Risler. Ce déplaisir s’était accru lorsque son beau-frère, malgré sa promesse, après deux ans de mariage avait emmené au pays sa femme et le petit Jean. Ce nom de Risler, au surplus, sonnait mal à l’oreille d’Antoine. Des renseignements venus du Niderhoff ne se trouvaient nullement favorables à la famille Risler, dont les cousins Louis et Jacob étaient médiocrement considérés dans le pays ; par surcroît, ce dernier avait épousé une Allemande et cette circonstance, aux yeux de l’honnête mais ignorant Antoine Blaisot, rapprochait singulièrement la frontière du côté du Rhin…

Plusieurs années s’écoulèrent et Jean ne pouvait ni se résoudre à oublier l’odieuse accusation dont son père avait été flétri, ni à accepter la réprobation qui le frappait, avec les siens. Oh ! comme il brûlait de grandir, de devenir un homme ! Il ne passait jamais devant les magasins de la rue du Faubourg-Saint-Antoine sans étudier, — grave et anxieux — dans les glaces des devantures les progrès accomplis… depuis la veille. À l’école, il montrait un âpre désir d’apprendre très rare chez les enfants. Quelle ambition l’excitait donc ? quelle vanité ? quel besoin de dominer, d’éclipser les autres élèves ? Jean obéissait à une idée plus avouable. Il voulait écrire lui-même à son ami « M. Bordelais », dont l’adresse demeurait pieusement gardée dans sa mémoire. C’est qu’il était si sûr de posséder en lui un ami ! L’oncle Antoine se montrait indulgent, mais en même temps froid, indifférent…

Avec Bordelais la Rose, on fortifierait, le moment venu, un pacte d’inaltérable amitié. Et puis l’ex-zouave avait connu son père ; Jean savait fort bien qu’il l’estimait. Tout lui disait que par le vieux soldat des compagnies franches des Vosges il pourrait obtenir la preuve de l’honnête conduite de son père. L’espoir lui revenait ; il se rappelait les dernières paroles que son père lui avait dites : Souviens-toi qu’il n’y a jamais eu de traître du nom que tu portes ! Et en bon fils, il avait hâte d’entreprendre une réhabilitation, à laquelle il voulait consacrer toute son énergie.

Jean put enfin écrire… et il eut de l’ancien soldat une réponse telle que le fils de Jacob Risler la pouvait souhaiter. Bordelais la Rose affirmait dans un style plein de franchise, assaisonné de jurons soldatesques, que le père de son petit ami n’avait pas été fusillé à Fontenoy. Il ne serait peut-être pas bien difficile, ajoutait-il, de mettre la main sur les papiers établissant l’identité du Lorrain de même nom surpris dans ce village en flagrant délit de trahison. Il entreprendrait cela un jour, lorsque ses rhumatismes lui laisseraient quelque répit, — des rhumatismes gagnés au siège de Sébastopol, sac et giberne ! où il fallait dormir dans la boue des tranchées…

Ce fut une grande joie pour Jean de recevoir de telles assurances. Il reprit courage tout à fait, et se montra moins impatient de grandir.

Le Niderhoff faisant partie des territoires perdus, c’est Paris qui devenait sa ville ; c’est dans la capitale qu’il devait songer à vivre et à s’établir. Un moment viendrait où il se trouverait en mesure, grâce à son travail, d’arracher sa sœur à ces vilains parents demeurés au village, — non pas Prussiens par force, ceux-là, mais Prussiens de la veille, — et il donnerait à tous une leçon sévère, obtenant pleine et entière réparation…

Voilà quels étaient les pensées, les sentiments et les aspirations du jeune garçon.

Pauline, aussi, avait grandi. Jean lui écrivait et recevait de bonnes réponses avec quelques mots dictés par la petite. C’étaient toujours des éloges pour la façon de se comporter envers elle de l’oncle Jacob et de la tante Grédel.

À chaque lettre du village, Antoine Blaisot disait invariablement : Tout va bien là-bas ; mais Jean, plus défiant à l’égard de ses parents d’Alsace-Lorraine, parvint à décider le brave Antoine à pousser une pointe jusqu’au Niderhoff pour voir et réconforter l’abandonnée Pauline.

Ce ne fut pas un long voyage ; mais Antoine rapporta de fâcheuses nouvelles : Sa nièce était souffrante, malgré les bonnes nouvelles contenues dans les lettres de la tante Grédel ; quant aux Risler, ils étaient toujours plus mal vus ; le père de Jean n’avait pas retrouvé l’estime de ses anciens amis. Le sabotier et sa femme, par leur opiniâtreté, avaient assuré le succès de leurs manœuvres.

Jean ne put entendre ces choses sans verser des larmes amères. Quant au ménage « allemand », au dire d’Antoine, « le torchon brûlait » : Jacob était parti pour le Cantal, entraîné par un courtier allemand qui faisait des achats pour une grande maison de Strasbourg. Il ne comptait pas revenir de sitôt.

À cela Jean haussait les épaules, lorsque son oncle lui dit brusquement :

— Tu ne sais pas ? il porte la croix de ton père…

Jean bondit. — Oui, reprit Antoine Blaisot ; cela lui est bien facile, avec son « toupet », puisqu’il s’appelle Jacob comme ton père, qu’il a été soldat comme ton père… La tante Grédel soutient que la croix appartient légitimement à son mari ; qu’elle lui était due, que ça a été une injustice ou une erreur. Elle le disait du moins à qui voulait l’entendre ; mais maintenant le Risler est en baisse ; c’est qu’avant de partir il lui a rompu les côtes ; je l’ai su…

— Et où est-il ? où est-il ce misérable ? répétait Jean, hors de lui, en tournant comme un fauve tout autour de la chambre voisine de l’atelier et qui servait à la fois de chambre à coucher, de salle à manger et de cuisine.

— Il écrit au pays… malgré la roulée, répondit l’oncle Antoine.

— Mais où est-il ? répétait Jean. Je veux le savoir.

Antoine Blaisot se mit à fouiller ses poches ; ce fut en vain ; puis levant son chapeau melon il chercha au milieu de quelques papiers qui en occupaient le fond et avaient pris des formes arrondies. Il trouva ce qu’il cherchait : l’enveloppe d’une lettre de Jacob Risler à sa femme, timbrée d’Aurillac.

— Oh ! s’écria Jean, si j’avais quinze ans, comme j’irais le souffleter ! Mais je suis assez fort pour lui sauter à la poitrine et lui arracher cette croix qu’il a volée à mon père, comme il lui a volé son honneur. Vous ne ressentez donc pas cette insulte, mon oncle ? ajouta le généreux enfant.

— Mais si… puisque je t’en parle comme d’une chose qui m’a révolté, dit l’oncle Antoine très calme. Ce qui me fait plaisir dans tout cela, c’est que l’Allemande a reçu une roulée d’importance. Il paraît qu’elle en a gardé le lit trois jours.

— Et pendant ce temps-là, Pauline, qui la soignait ?

— Ah ! tu m’en demandes trop, mon petit ! Tu dois comprendre que ta sœur ne peut pas être chez ces tristes gens comme auprès d’une mère !

— Pauvre Pauline ! murmura Jean.

— Quand elle aura deux ou trois ans de plus, nous verrons, mon garçon ! Je ne veux pas me remarier ; mais en fait de marmots, c’est assez de toi ici, — sans t’en faire reproche. Chaque jour Pauline grandit… dans quelque temps nous aviserons.

Jean accepta les encouragements de son oncle Antoine en ce qui concernait la fillette ; mais rien ne put le détourner de la pensée que son indigne parent usurpait la personnalité de son père.

Comme s’il lui était possible, par un violent effort de sa volonté, de sortir de cette enfance qui lui pesait, il ne se mêlait plus guère aux jeux des gamins de son âge. Le temps que les autres dissipaient, il l’employait à l’étude. Une page de sa géographie était noire et illisible à force d’avoir été lue. Quelle fascination exerçait-elle sur cet esprit ardent, sur cette nature précoce ? Qui eût pu s’en rendre compte en y lisant qu’Aurillac est le chef-lieu du département du Cantal, formé de la haute Auvergne, qu’on y fabrique des dentelles, de l’orfèvrerie, des chaudrons, et qu’on y fait un commerce actif de sabots, de fromages, de bœufs, de mulets et de chevaux…

En Auvergne ! Alors ces porteurs d’eau, ces marchands de marrons, ces commissionnaires, ces charbonniers, qu’on traitait d’Auvergnats, non sans une nuance de dédain, ils étaient de ce pays-là ? Le jeune garçon ne laissait pas échapper une occasion de questionner l’un de ces hommes, dont la bonhomie n’exclut pas une certaine ruse à l’endroit de leurs intérêts. L’oncle Antoine s’étonnait du goût nouveau de son neveu pour les marrons grillés. Les deux sous du dimanche étaient immédiatement employés à l’achat de cette friandise.

Mais Jean ne demeurait pas fidèle à son marchand. Il allait d’une « rôtisserie » à l’autre, et apprenait à connaître tous ceux qui les tenaient. Le marchand du coin de la rue Saint-Bernard était des environs de Mauriac ; dans la rue Saint-Antoine, il y en avait un de Saint-Flour, un autre de Murat, un autre de Chaudesaigues, un quatrième venait de Pierrefort. Le père Villamus, dont l’établissement figurait avantageusement sur le pas de la porte d’un marchand de vin de la place de la Bastille, était natif de Salers ; devant son fourneau, Jean rencontrait les externes paresseux de quelques institutions du quartier de l’Arsenal qui venaient jusque-là consulter le rôtisseur sur la version à faire, et le rôtisseur, fouchtra ! expliquait la version ; chose surprenante, grâce à son patois, il traduisait Cornélius Népos à livre ouvert, ni plus ni moins qu’un bachelier. Cela faisait aller son commerce.

Tout à coup Pierre Villamus céda son fonds, « après fortune faite », fortune modeste et dont se contentait le brave homme, — ce fut un événement douloureux pour les potaches et autres cancres, réduits désormais à faire leurs versions eux-mêmes. Villamus fut remplacé par un grand garçon du nom de Mathurin, passablement sournois, mais ayant l’immense mérite aux yeux de Jean de venir en ligne droite d’Aurillac… Enfin !

Jean eut des nouvelles de son oncle Risler, — un malin, disait le successeur du père Villamus. Jean offrit de faire la correspondance de Mathurin, se réservant de demander en post-scriptum quelques détails sur les agissements de son parent. Mathurin ne réussit pas dans les marrons et prit un crochet de commissionnaire. Il ne quitta point Paris au printemps et ne s’éloigna pas du quartier…

Un jour Jean, qui continuait sa correspondance, apprit par ce moyen que Jacob Risler allait se marier… Il se disait veuf d’une Parisienne morte pendant le siège. — Etait-ce sérieux ? Et Jacob Risler, poursuivant les agissements dont il tirait profit, songeait-il à se substituer tout à fait au père de Jean ? — Il était agréé favorablement dans sa nouvelle famille : « Chat fera des jureux jépoux », disait la lettre.

Le coup était trop fort ! Jean voulait partir immédiatement pour le Cantal. Son oncle lui rit au nez. Alors Jean écrivit à son ami, Bordelais la Rose, le suppliant de lui venir en aide. L’ancien soldat, dont les lettres étaient toujours affectueuses et tendres, répondit par l’envoi à son cher petit Jean des fonds nécessaires pour venir le trouver à Mérignac, à une lieue de Bordeaux.

Quelques jours après, l’ex-zouave et le fils du franc-tireur des Vosges prenaient le chemin de fer.

Nous les avons vus arriver à Figeac.