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Les Femmes poètes bretonnes/Mademoiselle Sophie Ulliac-Trémadeure (1794-1862)

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Les Femmes poètes bretonnes Voir et modifier les données sur WikidataSociété des bibliophiles bretons et de l’histoire de Bretagne Voir et modifier les données sur Wikidata (p. 87-94).


MADEMOISELLE SOPHIE
ULLIAC-TRÉMADEURE

1794-1862


MADEMOISELLE SOPHIE ULLIAC-TRÉMADEURE


Mademoiselle Sophie Ulliac-Trémadeure, fille d’un colonel du génie, née à Lorient, le 19 avril 1794, commença à écrire en 1815, et mourut à Paris, en avril 1862.

Elle signa ses premiers articles : Dudrezène, nom additionnel de son oncle le général de Trémadeure ; c’est sous ce nom qu’elle a publié des articles dans les tomes 7, 8, 9, 10, 16 et 17 du Lycée Armoricain : La Bague de crin, l’Épreuve, Amour et vérité, Léna et Arvin, Mina, Lisbeth, Rêveries, Trois Mois à Paris, et, enfin, l’ode que nous reproduisons, et qui a pour titre : Aux Muses de la Patrie. Mlle Dudrezène devait alors avoir trente-six ans (1830).

Plus tard, elle écrivit, sous son véritable nom, des livres de morale et de pédagogie, qui furent adoptés par le Comité central des Écoles de Paris ; plusieurs ont été couronnés par l’Académie française.

Elle a encore collaboré au Journal des Jeunes Personnes, dont elle était directrice, au Journal des Femmes, de 1832 à 1835, au Journal de Paris, 1834, au Voleur, etc.

1830, Contes aux Jeunes Artistes.

1832, Laideur et Beauté ; Histoire de Jean-Marie ; le Petit Bossu ; ce volume a eu 50 éditions et a obtenu le prix Monthyon.

1840, Claude Bernard, couronné par l’Académie.

1842, Les Contes de la Mère l’Oie.

D’après ces citations, on peut juger de la fécondité de cet écrivain. Quérard ajoute : « Mlle Dudrezène a traduit de l’allemand le roman d’Auguste Lafontaine, sous le nom de Trémadeure. Elle a traduit Frédérik Bronk, puis deux ouvrages pour la jeunesse, Le Portefeuille vert, traduit de l’allemand (Comps) ; l’Histoire et Voyage du Petit Jacques, traduit de l’anglais (Day) ; La Forêt de Veronetz, Paris, Gil Hubert, 1831, 4 vol. in-12 ; Henri ou l’Homme Silencieux ; l’Oiseleur, 1825, 1 vol. in-12, Paris, Boullonet dans le Lycée Armoricain, sous son véritable nom, etc… » Quérard prend le nom de Trémadeure pour un pseudonyme.

La Bibliothèque de Nantes possède 32 lettres de Mlle Trémadeure, adressées au général Mellinet. On y voit l’expression de sa sollicitude pour ses parents. Une lettre de son père semble lui attribuer un poème en vers, intitulé : Les Quatre Parties du Jour sur les côtes de Bretagne.

On nous assure qu’elle a encore publié deux volumes très curieux, intitulés : Souvenirs d’une vieille Fille. Nous n’avons pu nous les procurer.

AUX MUSES DE LA PATRIE

Éveillez-vous, Muses de la Patrie !
Le canon tonne en nos murs ébranlés ;

Éveillez-vous ! la liberté vous crie :
« Mes défenseurs sont déjà rassemblés. »

Quoi ! ces enfants ? En un jour de bataille,
Tous ces enfants deviennent des héros.
Sans sourciller ils bravent la mitraille,
Et de leurs rangs sortent des généraux.
Éveillez-vous, Muses de la Patrie !…

Vous les voyez accourir, ces fantômes,
Que la misère accueillit au berceau ;
De leurs sueurs s’engraissent les royaumes :
Leur sang bientôt va couler en ruisseau.
Éveillez-vous, Muses de la Patrie !…

Oui, les voilà ! mais les voilà sans armes.
Ils en auront ! Ils en auront demain !
Dès aujourd’hui s’apaisent les alarmes ;
De la Victoire ils savent le chemin.
Éveillez-vous, Muses de la Patrie !…

Elle dira, l’impartiale Histoire,
De ces trois jours les soins laborieux ;
Elle dira les combats, la victoire,
Tant de hauts faits et d’efforts glorieux.

L’Histoire encor, dans sa plus belle page,
Pourra tracer ce mot : Humanité,

Elle dira des soldats le courage
Cédant aux droits de la fraternité.

Muses, à vous il appartient de dire
Des citoyens le noble dévouement.
Montrez les pleurs se mêlant au sourire,
Et des adieux le terrible moment.

Muses, montrez ces femmes intrépides
Donnant la mort, ou donnant du secours.
Hier encor, tremblantes et timides,
Elles fuyaient au seul bruit des tambours.

Que nos guerriers dorment sur cette arène,
Qui s’abreuva de leur sang généreux !
De verts lauriers et de branches de chêne,
Tous, nous irons couvrir ce sol poudreux !

Éveillez-vous, Muses de la Patrie !
Le canon tonne en nos murs ébranlés ;
Éveillez-vous ! la Liberté vous crie :
« Mes défenseurs sont déjà rassemblés ! »