Mémoires extraits des recueils de l’Académie royale de Berlin/Solutions analytiques de quelques Problèmes sur les pyramides triangulaires

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SOLUTIONS ANALYTIQUES
DE QUELQUES
PROBLÈMES SUR LES PYRAMIDES TRIANGULAIRES.


(Nouveaux Mémoires de l’Académie royale des Sciences et Belles-Lettres
de Berlin
, année 1773.)


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Les pyramides triangulaires tiennent, par leur simplicité, parmi les corps solides le même rang que les triangles parmi les figures planes ; car de même que toute figure plane rectiligne peut être regardée comme composée de triangles, de même aussi tout corps solide terminé par des plans peut être supposé formé de pyramides triangulaires ; mais si les Géomètres se sont toujours beaucoup occupés de l’étude des triangles et n’ont cessé d’en approfondir les propriétés, ils n’ont fait, ce me semble, qu’effleurer celles des pyramides triangulaires ; et des principaux Problèmes qu’on peut proposer sur ces sortes de solides il n’y en a encore qu’un très-petit nombre qui ait été résolu. Ceux qui vont faire la matière de ce Mémoire concernent la manière de trouver la surface, la solidité, les sphères circonscrites et inscrites, le centre de gravité, etc., de toute pyramide triangulaire dont on connaît les six côtés[1] ; et je me flatte que les solutions que j’en vais donner pourront intéresser les Géomètres tant par la méthode que par les résultats.

Ces solutions sont purement analytiques et peuvent même être entendues sans figures ; j’y emploie des coordonnées rectangles pour déterminer la position des différents points que j’ai à considérer dans la pyramide, et je n’ai pas même besoin de donner aux axes de ces coordonnées une position déterminée ; je suppose seulement qu’ils se coupent au sommet de la pyramide, en sorte que pour ce point les coordonnées soient nulles, ce qui sert à simplifier les formules sans rien ôter à leur généralité. Par ce moyen tout se réduit à une affaire de pur calcul, et il est trèsfacile de déterminer la valeur des lignes qu’on veut connaître, puisqu’il ne faut que prendre la somme des carrés des différences des coordonnées qui répondent aux deux extrémités de chaque ligne proposée. Il ne s’agit plus ensuite que de rendre les résultats indépendants de la position arbitraire des coordonnées, en introduisant à leur place d’autres lignes relatives uniquement à la figure de la pyramide, comme les côtés de la pyramide, les perpendiculaires sur ses faces, etc. ; c’est à quoi je parviens a l’aide de quelques réductions et transformations assez remarquables que j’expose au commencement de ce Mémoire, et qui pourront être aussi du plus grand usage dans beaucoup d’autres cas. Indépendamment de l’utilité directe que ces solutions pourront avoir dans plusieurs occasions, elles serviront principalement à montrer avec combien de facilité et de succès la méthode algébrique peut être employée dans les questions qui paraissent être le plus du ressort de la Géométrie proprement dite, et les moins propres à être traitées par le calcul.

1. Si l’on a neuf quantités quelconques

et qu’on en forme ces neuf autres-ci

je dis qu’en supposant entre les neuf quantités données les six équations suivantes

et faisant, pour abréger,

on aura de même

C’est ce qu’il est aisé de vérifier par la substitution des valeurs de en

2. Donc, si l’on fait pareillement

et ensuite

on aura aussi

3. Or en substituant les valeurs de en et faisant, pour abréger,

on trouve

donc mettant ces valeurs dans les dernières équations ci-dessus, on aura, en vertu des six équations supposées dans le no 1,

et de là il est facile de tirer la valeur de en car on aura d’abord

et, substituant les valeurs de en (1),

on trouvera la même valeur de par les autres équations. Si l’on remet dans cette équation les quantités on aura la même équation identique que nous avons donnée dans le Lemme ci-dessus[2].

4. Il est bon de remarquer que la valeur de peut aussi se mettre sous cette forme

or si l’on multiplie cette équation par et qu’on y substitue ensuite à la place de à la place de et ainsi de suite (numéro précédent), on aura

ou bien en mettant pour leurs valeurs en (2)

d’où l’on voit que la quantité et son carré sont des fonctions semblables, l’une de l’autre de

5. De plus, comme on a (3)

et qu’il y a entre les quantités et les mêmes relations qu’entre les quantités et (1), on aura donc aussi

Donc on aura cette équation identique et très-remarquable

6. Si les six quantités étaient données et qu’on voulût déterminer par leur moyen les six quantités il serait peut-être très-difficile d’en venir à bout à l’aide des six équations du no 1 entre ces quantités ; mais on y parviendrait aisément par les formules des numéros suivants.

On formera pour cela les six quantités (2) ; ensuite on formera la quantité (4)

et l’on aura sur-le-champ (3)

7. Si l’on multiplie les neuf premières équations du no 1 respectivement par et qu’on les ajoute ensemble trois à trois, on trouvera ces neuf-ci, en mettant à la place de la quantité (3)

et l’on trouvera de même ces neuf autres-ci

8. De plus, si l’on ajoute ensemble trois à trois les neuf premières équations du numéro précédent après les avoir multipliées respectivement par ensuite par et enfin par on aura, en vertu des six dernières équations du no 1,

Et, si au lieu de multiplier les mêmes équations par on les multiplie respectivementpar et qu’on les ajoute de même trois à trois, on aura ces neuf autres-ci

Ces relations entre les quantités et leurs correspondantes sont très-remarquableset peuvent être utiles dans différentes occasions.

9. Regardons maintenant les trois quantités comme les coordonnées rectangles d’un point rapporté à trois axes fixes et perpendiculaires entre eux, et pareillement les quantités comme les coordonnées rectangles d’un autre point rapporté aux mêmes axes, et enfin les quantités comme les coordonnées rectangles d’un troisième point rapporté également à ces mêmes axes ; on aura, en joignant ces trois points par des lignes droites, un triangle dont la figure et la position seront déterminées par les neuf coordonnées Qu’on mène de plus des trois points au point d’intersection des trois axes, point que nous désignerons par trois autres droites, et l’on aura trois autres triangles qui, avec le triangle précédent formeront une pyramide triangulaire dont les quatre angles seront aux points ainsi la forme et la position de cette pyramide seront également déterminées par les mêmes coordonnées C’est sur les propriétés de cette pyramide que doivent rouler les recherches qui composent ce Mémoire.

10. Et d’abord il est visible par les formules du no 1 que les quantités expriment les carrés des distances des points au point et que les quantités

expriment les carrés des distances entre les points et entre les points et et entre les points et de sorte que si l’on désigne les carrés de ces distances par on aura

Ainsi les six côtés de la pyramide dont il s’agit seront

les trois premiers concourent au point qu’on peut regarder comme le sommet de la pyramide, et les trois derniers en forment la base ; de ma-

nière que le côté joint les deux le côté joint les deux et le côté rejoint les deux ce qui forme par conséquent quatre triangles, qui sont les quatre faces de la pyramide, et dont les côtés sont pour la première face latérale pour la seconde face latérale pour la troisième face latérale et pour la face qui sert de base

11. Si l’on voulait, à la place des côtés de la base, introduire les angles qui leur sont opposés au sommet de la pyramide, il n’y aurait qu’à remarquer que dans le triangle dont les côtés sont on a

donc substituant cette valeur dans l’expression de on aura

on trouvera de même les valeurs de exprimées en et et l’on aura de cette manière

12. On sait que si sont les trois côtés d’un triangle rectiligne, son aire est exprimée par la formule

Ainsi pour le triangle dont les côtés sont on aura l’aire

Pour le triangle dont les côtés sont on aura l’aire

et pour le triangle dont les côtés sont on aura l’aire

Reste encore à considérer le triangle dont les côtés sont nommant l’aire de ce triangle, on aura par la formule ci-dessus

mettons pour leurs valeurs

on aura

donc

Ainsi les aires des quatre faces de la pyramide s’expriment d’une manière fort simple par les quantités (1) ; on a pour celles des trois faces latérales les quantités

et pour l’aire de la base la quantité

13. Voyons maintenant comment doit être exprimée la solidité de la pyramide. On sait que toute pyramide est égale au tiers du produit de sa base par sa hauteur ; or nous avons déjà trouvé la valeur de la base ainsi, nommant la hauteur de notre pyramide, c’est-à-dire la valeur de la perpendiculaire menée du sommet sur le plan du triangle opposé on aura pour la solidité cherchée ; mais la difficulté consiste à trouver la quantité Soient les trois coordonnées rectangles qui déterminent la position d’un point quelconque du plan dont nous venons de parler, on aura, comme on sait, l’équation

les quantités étant des constantes qui dépendent de la position du plan ; et comme ce plan est supposé passer par les trois points pour lesquels les coordonnées sont (9)

on aura, en substituant successivement ces valeurs à la place de les équations suivantes

par lesquelles on pourra déterminer les trois constantes

Retranchant d’abord ces équations l’une de l’autre, on a ces deux-ci

d’où l’on tire sur-le-champ

c’est-à-dire en développant les termes et substituant les quantités du no 1,

Ensuite la première équation donnera

ce qui, en vertu des équations du no 7, se réduit à cette expression fort simple

On a donc ainsi l’équation du plan de la base de la pyramide ; nous l’avons cherchée d’autant plus volontiers qu’elle nous sera fort utile encore dans la suite.

14. Or la ligne menée du sommet à un point quelconque de ce plan, c’est-à-dire la distance des points et est exprimée par

et il est clair que la plus courte de toutes ces lignes sera la quantité cherchée ainsi il n’y aura qu’à faire égale à zéro la différentielle de ce qui donne

mais l’équation

donne

donc substituant cette valeur et égalant séparément à zéro les coefficients de et de on aura

donc

ce qui, étant substitué dans l’équation

donne

et de là

et, substituant ces valeurs dans l’expression on aura la valeur cherchée de qui sera donc

Substituons à présent à la place de leurs valeurs trouvées ci-dessus, on aura

c’est-à-dire, en développant les termes qui sont sous le signe et faisant les substitutions du no 1,

Mais on a trouvé (12)

donc on aura pour la solidité de notre pyramide la quantité C’est ce que nous avons déjà démontré d’une autre manière ci-dessus, où nous avons nommé la même quantité que nous désignons ici par [3].

15. Il est bien remarquable que la quantité exprime la solidité de la pyramide prise six fois ; si donc on veut exprimer cette solidité par les six côtés il n’y aura qu’à mettre dans la valeur de à la place de les expressions du no 10 ; mais il sera plus simple de conserver les quantités mêmes et l’on aura (3) la solidité cherchée égale à

Et comme nous avons trouvé plus haut que les aires des faces de la pyramide s’expriment d’une manière fort simple par les quantités on pourra aussi, si l’on veut, exprimer la solidité de la pyramide par ces mêmes quantités à l’aide des formules du no 4 ; on aura de cette manière la solidité de la pyramide égale à

16. Comme il faut six éléments pour la détermination d’une pyramide triangulaire, il est clair que si l’on ne connaissait que la valeur de l’aire de chacune de ses quatre faces, avec celle de sa solidité, on n’aurait que cinq équations, et que par conséquent le Problème de trouver la pyramide qui satisferait à ces données serait indéterminé. En effet les aires des trois faces latérales donneraient les valeurs des trois quantités et celle de la base donnerait la valeur de (12) ; ensuite la considération de la solidité donnerait (numéro précédent) la valeur de la quantité

de sorte qu’on n’aurait que deux équations entre les trois inconnues On pourrait donc prendre une de ces inconnues à volonté, et alors la solution du Problème se trouverait réduite à la résolution d’une équation du second degré.

17. Mais s’il n’y avait de donné que les quatre faces de la pyramide, et qu’il s’agît de trouver les dimensions de la pyramide dont la solidité serait la plus grande, on pourrait résoudre cette question par nos formules avec beaucoup de facilité.

Car il est d’abord clair que les trois quantités seraient données ainsi que la quantité ainsi il ne faudrait que rendre un maximum la quantité

en y regardant comme constantes, et comme variables,

mais de manière que leur somme demeure constante ; on aurait donc ces deux équations différentielles

d’où chassant et égalant à zéro les coefficients de et on tire ces deux équations de condition

qui renferment la solution du Problème. Ces deux équations se réduisent par les formules du no 2 à

et par celles du no 3 à

d’où l’on voit que les trois quantités doivent être égales entre elles. Ainsi, comme les quantités sont supposées données ainsi que la somme on aura ces quatre équations

d’où il faudra tirer et

Si l’on fàit pour plus de simplicité

on a, en divisant la dernière équation par

et prenant les carrés

or les trois premières équations donnent

et de là on tire

Donc substituant ces valeurs et faisant pour simplifier encore

on aura, après avoir ôté les fractions,

équation qui, étant développée, ne montera qu’au quatrième degré par la destruction des termes qui contiendraient et l’on trouvera que le premier terme de cette équation sera

c’est-à-dire (en remettant la valeur de et de )

et que le dernier sera de sorte que comme les quantités sont nécessairement positives (12) ainsi que la quantité

ces deux termes seront de signes différents ; par conséquent l’équation aura toujours au moins une racine réelle et positive.

Ayant trouvé une valeur positive de on aura et de là on aura par les formules ci-dessus ; ainsi l’on connaîtra les six côtés de la pyramide, à cause de

18. Considérons un autre point placé où l’on voudra, au dedans ou au dehors de la pyramide, pour lequel les coordonnées rectangles soient et supposons que le carré de la distance de ce point au sommet de la pyramide soit que les carrés des distances du même point aux points de la base de la pyramide soient il est facile de concevoir qu’on aura

d’où, en faisant, pour abréger,

on tire (1) ces trois équations

par lesquelles on pourra déterminer les valeurs des coordonnées et l’on trouvera par les règles connues de l’élimination, en mettant les quantités à la place de (1) et la quantité à la place de (3),

19. Or il faut que ces valeurs de satisfassent à la première équation

les y substituant donc, et faisant les substitutions des dernières formules du no 1, on aura, après avoir multiplié par

équation qui servira à déterminer, si l’on veut, la quantité par les quantités

Ainsi l’on pourra par le moyen de cette équation résoudre le Problème suivant, qui paraît d’ailleurs assez difficile.

20. Étant donné un solide formé par deux pyramides triangulaires adossées l’une contre l’autre par leurs bases supposées égales ; trouver la valeur de la diagonale, c’est-à-dire de la ligne droite qui joindrait les sommets opposés des deux pyramides, en supposant qu’on connaisse les neuf côtés de ce solide.

Il est visible que si l’on imagine que le point soit le sommet de la seconde pyramide, dont la base soit le même triangle qui sert de base à la première pyramide, on aura pour le carré de la diagonale cherchée, et pour les carrés des neuf côtés donnés des deux pyramides ; ainsi il n’y aura qu’à mettre dans l’équation du numéro précédent à la place de leurs valeurs, et l’on aura

Cette équation étant ordonnée par rapport à montera au second degré et aura par conséquent deux racines qui seront nécessairement toutes deux réelles ; en effet il est visible que le Problème ad met deux solutions, parce que l’on peut concevoir que les deux pyramides qui ont leur base commune soient, ou des deux côtés opposés de cette base, ou bien du même côté ; la plus grande des deux valeurs de appartiendra au premier cas, et la moindre au second.

21. Supposons maintenant que le point soit pris en sorte qu’il soit également distant des quatre angles de la pyramide du no 9 ; il est clair que ce point deviendra le centre de la sphère qui serait circonscrite à cette pyramide. On aura donc dans ce cas

et l’équation du numéro précédent deviendra

d’où l’on tire

et cette quantité sera le carré du rayon de la sphère circonscrite à la pyramide.

Quant à la position du centre de cette sphère, elle sera déterminée par les coordonnées lesquelles, à cause de

auront les valeurs suivantes (18)

ou bien en substituant pour leurs valeurs en (8),

22. Considérons encore le même point déterminé par les coordonnées du no 18, sans supposer que ce point soit le centre de la sphère circonscrite, et voyons comment on peut déterminer la distance de ce point à la base de la pyramide, c’est-à-dire la ligne perpendiculaire menée du même point sur le plan de cette base.

Pour cela on suivra une méthode analogue à celle du no 14, en remarquant seulement que la distance du point au point quelconque du plan sera exprimée par

de sorte qu’on aura, en égalant la différentielle de cette quantité à zéro, l’équation

laquelle, en substituant pour sa valeur (numéro cité) et faisant séparément égaux à zéro les coefficients de et de donnera ces deux-ci

d’où

ce qui étant substitué dans l’équation

on aura

et de là

donc

mais en substituant, dans la quantité

pour et leurs valeurs ci-dessus

elle devient

et mettant encore pour la valeur qu’on vient de trouver, elle se changera en celle-ci

Substituant enfin à la place des quantités leurs valeurs du no 13, on aura la quantité

ou bien, par les formules du no 1,

qui sera donc la valeur de la perpendiculaire menée du point sur la base de la pyramide.

23. On peut déduire de cette même formule la valeur des trois autres perpendiculaires qu’on pourrait mener du même point sur les trois faces latérales de la pyramide. Pour cela il suffit de considérer qu’en faisant coïncider successivement les points avec le point le triangle prendra successivement la place des triangles or il est clair que cela n’exige autre chose que de faire évanouir les coordonnées ou ou ainsi il n’y aura qu’à faire pour le premier cas nulles et par conséquent aussi et égales à zéro, pour le second cas, nulles et par conséquent et égales à zéro, pour le troisième cas et par conséquent et égales à zéro (1 et 4) ; mais il faut observer que tandis que le triangle prend la place des triangles le point supposé au dedans de la pyramide traverse le plan de ce triangle et passe de l’autre côté de ce plan, ce qui doit faire changer de signe à l’expression de la perpendiculaire menée du point sur ce même plan ; donc les trois perpendiculaires menées de ce point sur les trois faces latérales seront exprimées par les quantités suivantes

24. Désignons par la perpendiculaire menée du point dont les coordonnées sont sur la base de la pyramide, et par les perpendiculaires menées du même point sur les faces latérales on aura par les deux numéros précédents les équations

lesquelles donnent d’abord celle-ci

qu’on aurait pu trouver immédiatementpar cette considération que, si du point on mène aux quatre coins de la pyramide des droites, elles formeront quatre nouvelles pyramides, ayant toutes leurs sommets au point et ayant pour bases les quatre faces de la pyramide donnée, en sorte que celle-ci se trouvera par là partagée en quatre autres pyramides et par conséquent sa solidité sera égale à la somme des solidités des pyramides partielles qui la composent. Or les aires des faces de la

pyramide donnée sont (12)

donc, multipliant ces aires par le tiers des perpendiculaires et abaissées du point sur ces mêmes faces, on aura les quantités

qui exprimeront les solidités des quatre pyramides partielles qui ont le point pour sommet commun et les triangles pour bases ; mais la somme de ces solidités doit être égale à la solidité totale de la pyramide donnée, laquelle étant exprimée (14) par on aura par conséquent l’équation ci-dessus ; ce qui pourrait servir, s’il était nécessaire, à prouver la bonté de nos calculs.

25. Si les trois perpendiculaires étaient supposées données et qu’on voulût connaître la position du point d’où elles sont menées, il n’y aurait qu’à tirer les valeurs des coordonnées de ces trois équations

et l’on trouvera pour des expressions analogues à celles du no 18 en y changeants en et en ce qui change ces dernières en (1 et 2), c’est-à-dire en (3), et la quantité en (5).

De sorte qu’on aura

26. Par là on pourra connaître si l’on veut les distances de ce même point aux angles de la pyramide donnée ; car conservant les mêmes dénominations du no 18, on aura par la substitution des valeurs précédentes de et d’après les formules du no 1,

étant les carrés des distances cherchées.

27. Réciproquement, si ces distances étant données on voulait connaître les perpendiculaires il n’y aurait qu’à les tirer, par l’élimination, des trois dernières équations ci-dessus ; et pour cela on remarquera que, si dans les trois équations du no 18 on change en et en elles deviennent les précédentes ; d’où il s’ensuit qu’on aura pour les mêmes expressions qu’on a trouvées dans le numéro cité pour en y échangeant seulement en Or par ces échanges les quantités deviennent (1) et la quantité

devient

c’est pourquoi on aura, après avoir multiplié par

28. Les formules qu’on vient de trouver dans les numéros précédents peuvent servir à résoudre avec beaucoup de facilité le Problème, où il s’agirait de trouver dans l’intérieur d’une pyramide donnée un point tel, que menant de ce point aux quatre angles de la pyramide des lignes droites qui la partageassent en quatre autres pyramides ayant ce point pour sommet et les faces de la pyramide donnée pour bases, ces pyramides partielles fussent entre elles dans des rapports donnés.

Soient les rapports de ces quatre pyramides partielles à la pyramide totale donnée exprimés par les quantités et en sorte que l’on ait

donc, par ce que l’on a dit dans le no 24, on aura

donc, substituant ces valeurs dans les expressions des quantités du no 25, on aura sur-le-champ, pour la détermination du point cherché, ces trois coordonnées rectangles

Et si l’on veut déterminer ce point par ses distances au sommet et aux trois angles de la base de la pyramide donnée, on aura, par les formules du no 26,

29. Si maintenant on suppose dans les formules du no 24

il est clair que le point deviendra le centre de la sphère inscrite à la pyramide, et que en sera le rayon ; ainsi l’équation de ce même numéro donnera sur-le-champ

en faisant, pour abréger,

Ensuite on aura (25) pour la détermination du centre de la sphère les coordonnées

Et, si l’on veut déterminer ce point par les distances

aux angles de la pyramide, on aura (26)

30. Dans toutes ces formules il faut prendre les radicaux positifs, pour avoir véritablement le cas d’une sphère inscrite dans la pyramide ; mais il est remarquable qu’en prenant l’un de ces mêmes radicaux négatif on aura le cas où la sphère tomberait hors de la pyramides, et toucherait en même temps une de ses faces en dehors, et les plans des trois autres faces prolongés ; et en particulier la face touchée en dehors par la sphère sera celle dont l’aire sera représentée par la moitié du radical auquel on donnera le signe négatif (12). C’est de quoi on peut se convaincre en réfléchissant sur la nature de nos formules et de notre Analyse, sans qu’il soit nécessaire que nous entrions là-dessus dans aucun détail.

31. Venons maintenant à la considération du centre de gravité de notre pyramide, et pour en trouver la position nous remarquerons que si l’on fait passer par un quelconque des côtés de la pyramide un plan qui coupe le côté opposé en deux également, le centre de gravité de la pyramide se trouvera nécessairement dans ce plan ; c’est ce qui se démontre facilement par les principes de Mécanique. Or comme trois plans différents ne peuvent se couper qu’en un seul point, il suffira donc de considérer trois des plans dont nous venons de parler et de chercher le point qui leur sera commun. Nous imaginerons pour cela qu’on mène par les trois côtés de la base de la pyramide trois plans qui coupent les côtés opposés des faces latérales par le milieu ; nous chercherons l’équation de chacun de ces plans et nous en déduirons ensuite aisément la position du point commun, qui sera par conséquent le centre de gravité cherché.

32. Considérons d’abord le plan qui passerait par le côté de la hase et qui couperait par le milieu le côté qui va du sommet à l’autre angle de la base ; et, nommant, comme dans le no 13, les coordonnées rectangles des points de ce plan, on aura une équation de la forme

étant des constantes dépendantes de la position du plan.

Pour déterminer ces constantes on remarquera que, comme le plan est supposé passer par les points de la base de la pyramide, pour lesquels les coordonnées rectangles sont (9), on aura d’abord ces deux équations

Ensuite, comme on veut que ce plan passe aussi par le milieu de la ligne menée du point qui est l’origine des coordonnées, au point pour lequel les coordonnées rectangles sont on considérera que ce point du milieu de la ligne sera nécessairement déterminé par les coordonnées rectangles de sorte qu’on aura cette troisième équation

ou bien, en multipliant par

Cette équation étant retranchée des deux précédentes multipliées par on aura

d’où l’on tire

et développant les termes (1)

Ensuite on aura (7)

et par conséquent

De sorte que l’équation du plan dont il s’agit sera, en multipliant par et transposant les termes,

33. On trouvera de la même manière l’équation du plan qui passerait par le côté de la base et qui couperait le côté opposé ainsi que celle du plan qui, passant par le côté de la base, couperait le côté mais sans faire pour cela un nouveau calcul il suffira de changer dans l’équation ci-dessus les coordonnées en et vice versâ pour le premier cas, et en et vice versâ pour le second cas. Or par le premier de ces changements les quantités se changent en de même les quantités se changent en et la quantité se change en Et par le second de ces changements les quantités se changent en C’est ce qu’on peut voir aisément par les formules des nos 1 et 3.

Ainsi l’on aura pour les équations des deux plans dont nous venons de parler, après y avoir changé les signes,

34. Or, dans le point commun aux trois plans, les coordonnées doivent être les mêmes ; c’est pourquoi il n’y aura qu’à tirer les valeurs de ces trois quantités des trois équations que nous venons de trouver, et l’on aura les coordonnées qui déterminent le point d’intersection des trois plans en question. Pour cela je retranche d’abord des deux équations du numéro précédent celle du no 32, et j’ai ces deux-ci

d’où je tire facilement

c’est-à-dire, en développant les termes et employant les substitutions du no 2,

ou bien (3)

Substituant les valeurs de et de tirées de ces équations dans celle du no 32, on en déduira la valeur de laquelle sera

mais le dénominateurde cette formule se réduit par les équations du no 7 à de sorte qu’on aura, pour les coordonnées qui répondent au

centre de gravité de la pyramide, ces expressions fort simples

35. Si l’on imagine qu’il y ait aux quatre coins de la pyramide des corps de masses quelconques égales entre elles, il est visible que le moment de ces corps, que je suppose égaux à par rapport à un plan passant par le sommet de la pyramide et perpendiculaire à l’axe des sera

ce qui, étant divisé par la somme des masses donnera

pour la distance du centre de gravité de ces quatre corps au même plan. On trouvera de même que la distance du même centre au plan passant par le sommet et perpendiculaire à l’axe des sera exprimée par

et qu’enfin la distance de ce même centre au plan passant par le sommet et perpendiculaire à l’axe de sera

Or ces distances ne sont autre chose que les coordonnées rectangles qui déterminent la position du centre dont il s’agit par rapport aux mêmes axes ; donc les coordonnées du centre de gravité des quatre corps placés aux quatre coins de la pyramide sont (numéro précédent) les mêmes que celles du centre de gravité de toute la pyramide ; par conséquent ces deux centres coïncident, ce qui fournit ce Théorème de Statique assez remarquable par sa simplicité : Le centre de gravité de toute pyramide triangulaire est le même que celui de quatre corps égaux qu’on imaginerait placés aux quatre angles de la pyramide.

36. Si l’on veut déterminer la position du centre de gravité par ses distances aux quatre coins de la pyramide, nommant le carré de la distance de ce centre au sommet, et les carrés de ses distances aux trois angles de la base, on aura

donc, substituant pour les valeurs ci-dessus, développant les termes et faisant les substitutions du no 1, on aura

37. On pourrait chercher maintenant à déterminer la position mutuelle des trois points que nous venons de considérer dans la pyramide, c’est-à-dire le centre de la sphère circonscrite, le centre de la sphère inscrite et le centre de gravité de la pyramide même, et il est clair que si, pour distinguer les coordonnées des centres des deux sphères, on désigne par celles du centre de la sphère circonscrite que nous avons désignées par (21), et que l’on conserve ces dernières lettres pour marquer les coordonnées du centre de la sphère inscrite ainsi qu’on en a usé (29), il est clair, dis-je, qu’on aura

pour le carré de la distance entre les centres des deux sphères, l’une inscrite, l’autre circonscrite,

pour le carré de la distance entre le centre de la sphère circonscrite et le centre de gravité, et enfin

pour le carré de la distance entre le centre de la sphère incrite et le même centre de gravité. Or faisant dans ces expressions les substitutions des valeurs de (21, 29, 34), et développant ensuite les termes on trouvera, à l’aide des formules du no 1, des quantités indépendantes des coordonnées et qui seront uniquement des fonctions de c’est-à-dire des côtés de la pyramide. Par le moyen de ces formules et de celles que nous avons trouvées précédemment on pourra résoudre différents Problèmes curieux et nouveaux sur les pyramides triangulaires ; mais en voilà assez sur un sujet que je n’ai presque traité que pour donner un exemple de l’application de l’Analyse à ces sortes de recherches.


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  1. Je nomme côtés les lignes formées par la rencontre des plans sous lesquels la pyramides est comprise, et je nommerai ces plans faces de la pyramide.
  2. Ce Lemme est la première des propositions du Mémoire relatif au mouvement de rotation d’un corps solide. Voir à la page 580 de ce volume.
    (Note de l’Éditeur.)
  3. Œuvres de Lagrange, t. III, p. 585.