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Mémoires extraits des recueils de l’Académie royale de Berlin/Sur l’intégration des équations à différences partielles du premier ordre

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SUR L’INTÉGRATION
DES
ÉQUATIONS À DIFFÉRENCES PARTIELLES
DU PREMIER ORDRE.


(Nouveaux Mémoires de l’Académie royale des Sciences et Belles-Lettres
de Berlin
, année 1772.)


Séparateur


1. Lorsqu’on a une fonction de plusieurs variables on appelle différences partielles de celles qui résultent de la différentiation de en y faisant varier chacune des quantités à part ; ainsi, supposant que la valeur complète de soit représentée par

les différents termes

de cette différentielle seront les différences partielles du premier ordre de On a coutume de représenter les coefficients des différences dans la différentielle de par de sorte que la valeur complète de sera représentée par

Ainsi, si l’on a une équation entre et ce

sera une équation à différences partielles du premier ordre ; et c’est sur l’intégration de ce genre d’équations que je me propose ici de donner quelques nouveaux principes.

2. Supposons que soit une fonction de et de seulement, et que l’on ait pour la détermination de cette fonction une équation en si l’on fait pour plus de commodité on aura

et l’équation donnée sera entre les cinq variables en sorte qu’on pourra par cette équation déterminer, par exemple, en la quantité sera donc encore indéterminée, et la question se réduira à la déterminer de façon que l’équation

soit intégrable, ou d’elle-même, ou étant multipliée par un facteur quelconque.

Soit en général. le facteur que la différentiation aura pu faire disparaître, en sorte que la quantité

soit une différentielle exacte d’une fonction de que nous désignerons par on aura donc

et de là

d’où l’on tire les conditions suivantes

par lesquelles il faudrait déterminer et La dernière de ces équations

donne celle-ci

laquelle, en substituant pour et leurs valeurs données par les deux premières, devient

c’est-à-dire, en effaçant ce qui se détruit et divisant le reste par

or, comme est (hypothèse) une fonction donnée de et cette équation ne contiendra plus que l’inconnue et la difficulté sera réduite à déterminer par son moyen la valeur de en

3. Quoique de cette manière on ait trouvé l’équation qui doit servir à déterminer il paraît qu’on n’a guère avancé dans la solution du Problème proposé ; car au lieu qu’on avait une équation entre , pour la détermination de on en a maintenant une entre pour la détermination de laquelle, à la considérer, en général, doit être au moins aussi difficile à résoudre que celle-là, si même elle ne l’est pas davantage à cause qu’elle contient une variable de plus. Il y a cependant une circonstance qui doit la faire regarder comme plus simple que la proposée, c’est que les différentielles et n’y paraissent que sous une forme linéaire ; d’ailleurs nous remarquerons qu’il ne sera pas nécessaire de résoudre cette équation d’une manière complète, mais qu’il suffira de trouver une valeur quelconque de qui y satisfasse, pourvu qu’elle contienne une constante arbitraire ; car nous ferons voir bient\delta t comment, à l’aide d’une telle valeur de on pourra néanmoins parvenir à la solution générale et complète de l’équation proposée.

4. Pour faire voir d’une manière encore plus directe comment l’équation que nous venons de trouver pour la détermination de peut servir à résoudre le Problème dont il s’agit, reprenons l’équation

dans laquelle est une fonction donnée de et où est supposé une fonction de telle, que l’équation soit intégrable, soit d’elle-même, soit à l’aide d’un multiplicateur quelconque. Qu’on suppose que l’une des trois variables devienne constante, par exemple en sorte qu’on ait l’équation à deux variables

soit le facteur qui rendra la différentielle intégrable (facteur qu’on peut toujours trouver à posteriori dès qu’on aura intégré l’équation ) ; on aura donc

étant une fonction de et de dans laquelle entrera aussi comme constante ; par conséquent on aura

mais en regardant et comme variables à la fois, on a, pour la valeur complète de la différentielles

donc on aura

ainsi l’équation

étant multipliée par deviendra celle-ci

qui devra donc être intégrable. Or comme est une fonction connue de on aura réciproquement égale à une fonction connue de de sorte qu’on pourra introduire la variable à la place de la variable qu’on fasse donc cette substitution dans la quantité et comme l’équation ne contient que les deux différentielles et il est clair qu’elle ne pourra être intégrable à moins que la variable ne disparaisse entièrement de la quantité Supposons, pour abréger, cette quantité égale à et il faudra qu’en substituant dans à la place de sa valeur en et la variable s’en aille en même temps que donc aussi si, dans la différentielle

on substitue pour sa valeur tirée de l’équation

il faudra que la différentielle disparaisse ; mais, la substitution faite, on a

savoir

donc il faudra qu’on ait

Or

donc on aura cette équation de condition

mais on a déjà

donc on aura

donc l’équation précédente deviendra

savoir, en ôtant ce qui se détruit,

De plus les mêmes équations

donnent

savoir

donc, retranchant de cette équation la précédente multipliée par et divisant le reste par on aura celle-ci

qui est, comme on voit, la même qu’on a trouvée plus haut.

5. Ainsi, dès qu’on aura satisfait à l’équation précédente par le moyen de la valeur de on sera assuré qu’en chassant de la quantité

par l’introduction de la variable la quantité s’en ira en même temps, de sorte qu’on aura alors l’équation à deux variables

Soit donc la fonction de et de par laquelle il faudra multiplier maintenant la différentielle

pour la rendre intégrable (fonction qu’on pourra toujours trouver par l’intégration de l’équation ), et comme

sera une différentielle exacte d’une fonction de et si l’on remet à la place de sa valeur en et ce qui, à cause de

transforme la différentielle dont il s’agit en celle-ci

il est évidént que cette dernière différentielle sera pareillement une différentielle exacte d’une fonction de et d’où il s’ensuit que sera le facteur propre à rendre intégrable la différentielle

et qu’ainsi l’on aura (2)

de sorte que connaissant et on connaitra sur-le-champ le facteur et de là par l’intégration on pourra connaître la valeur de la fonction finie

6. On voit donc clairement par l’analyse précédente que la solution du Problème ne dépend que de la recherche de la quantité à l’aide de l’équation de condition

laquelle est connue depuis longtemps ; car, dès que cette condition sera remplie, on pourra toujours trouver le multiplicateur qui rendra intégrable l’équation

et l’intégration donnera ensuite la valeur cherchée de en et

Si la valeur de qui satisfait à l’équation de condition, a toute la généralité que cette équation comporte, on aura par son moyen la valeur complète de mais si la valeur de n’est que particulière, on ne trouvera d’abord qu’une valeur particulière et incomplète de la fonction cherchée cependant si la valeur particulière de est telle, qu’elle renferme une constante arbitraire, on pourra compléter la valeur de de la manière suivante.. On cherchera d’abord, d’après cette valeur particulière de le multiplicateur qui rendra intégrable la différentielle

et l’on aura, en intégrant, l’équation

Désignons, pour plus de simplicité, par la quantité

qui sera nécessairement une fonction finie de et soit de plus la constante arbitraire qui entre dans la valeur de et il est clair que cette constante entrera aussi comme telle dans l’expression de supposons maintenant que cette même quantité au lieu d’être constante, soit aussi une fonction variable, et il est visible que dans ce cas la différentielle

complète de ne sera plus simplement

mais

de sorte qu’on aura, dans l’hypothèse de la variabilité de

et par conséquent

Donc, si pour satisfaire aux conditions du Problème on veut que la différentielle

soit intégrable d’elle-même, il faudra que la différentielle le soit aussi en particulier ; ce qui ne saurait évidemment avoir lieu, à moins que ne soit une fonction quelconque de

Que dénote donc une fonction quelconque de et supposant on fera

équation par laquelle on pourra déterminer Ensuite on aura

donc

de là on aura l’équation intégrale

ou bien simplement

[à cause que la constante peut être censée renfermée dans la fonction ], laquelle servira à trouver la valeur de la fonction et il est clair que cette valeur de sera complète, puisqu’elle contiendra une fonction arbitraire.

7. On voit donc aussi par là que toute équation de la forme

est supposée une fonction quelconque donnée de est telle, que si l’on connaît seulement une valeur particulière de mais qui renferme une constante arbitraire on pourra toujours trouver la valeur complète de car il n’y aura qu’à tirer la valeur de de l’équation

et la substituer ensuite dans la valeur particulière et connue de

8. Pour montrer maintenant l’application du Théorème précédent, nous allons parcourir les principaux cas dans lesquels l’équation de condition est facile à remplir par le moyen d’une valeur particulière de qui se présente naturellement, et nous en verrons naître les solutions de la plupart des Problèmes de ce genre qui n’ont été résolus jusqu’ici que par des méthodes particulières.

Premier Cas. — Lorsque est une fonction de seul.

Soit une fonction quelconque de et supposons qu’on ait

l’équation de condition (6) deviendra, en faisant

à laquelle il est visible que satisfait cette valeur

On aura donc ainsi

( étant ce que devient lorsque ), d’où l’on voit que la différentielle

deviendra

laquelle est évidemment intégrable d’elle-même. Intégrant donc un aura

de là, en faisant varier on aura

( étant égal à ) ; donc

équation d’où l’on tirera la valeur de , qui étant ensuite substituée dans l’équation

ou bien

donnera la valeur complète de


Deuxième Cas. — Lorsque est une fonction de et de

Soit une fonction de et de en sorte que

et supposons

l’équation de condition deviendra la même que ci-dessus, à cause que

ainsi l’on y pourra satisfaire en prenant de même

ce qui rendra égal à une fonction de seul ; de sorte que la quantité

savoir

sera intégrable d’elle-même, et l’on aura

de là on tirera

par conséquent on aura l’équation

laquelle servira à déterminer ensuite de quoi on aura par l’équation

ou bien

Troisième Cas. — Lorsque est une fonction de et de

Dans ce cas il est clair que la valeur de sera réciproquement exprimée par une fonction de et donc regardant comme l’inconnue, et supposant une fonction de et on aura

et l’équation de condition deviendra, en supposant

à laquelle on peut satisfaire en prenant égal à une constante ce qui rendra égal à une fonction de seul, en sorte que la quantité

ou bien

sera intégrable d’elle-même. Ainsi l’on aura

et de là

d’où l’on tirera qu’on substituera dans l’équation

Quatrième Cas. — Lorsqu’une fonction de et est égale à une fonction de et .

Soit une fonction de et et une fonction de et , en sorte qu’on ait

il est clair que si l’on prend une constante et qu’on fasse

on aura, par la première de ces équations, exprimé par une fonction de seul, et par la seconde on aura exprimé par seul ; en sorte que les différentielles seront nulles d’elles-mêmes ; ainsi l’équation de condition se trouvera remplie, et il est visible que la quantité

sera intégrable sans aucune préparation ; on aura donc

et de là

d’où l’on tirera la valeur de pour la substituer dans l’équation laquelle deviendra donc

Cinquième Cas. — Lorsqu’il y a entre et une équation dans laquelle et ne montent qu’à la première dimension.

Soient et des fonctions quelconques de et et supposons qu’on ait

substituant donc cette valeur dans l’équation de condition, elle deviendra

Il est d’abord clair que si l’on suppose que ne contienne point cette équation se simplifiera beaucoup, car elle deviendra, en faisant pour plus de simplicité et

Mais cette équation est encore trop compliquée pour qu’on puisse trouver facilement une valeur particulière de qui y satisfasse. Considérons donc plutôt la quantité même

ou bien, en mettant à la place de

laquelle doit être une différentielle exacte, ou d’elle-même, ou étant multipliée par un facteur convenable et il est d’abord clair que, comme est une fonction donnée de et si l’on cherche le facteur qui rendra intégrable la quantité et qu’on suppose ensuite

on aura à rendre intégrable cette quantité plus simple

est une fonction inconnue, et une fonction connue de et de ou bien de et de en substituant à la place de sa valeur en et tirée de l’équation

or on sait que la quantité dont il s’agit sera intégrable si l’on a

ce qui donne, en intégrant suivant

étant une constante arbitraire ; ainsi l’on a une valeur particulière de laquelle donne

donc

ce qui servira à déterminer ensuite de quoi on aura l’équation

Or comme on a

il est clair que sera une fonction quelconque de de sorte que l’équation qui sert à déterminer pourra être représentée plus simplement ainsi

Au reste on aurait pu voir d’abord par l’équation

que la constante pouvait être une fonction quelconque de puisque l’intégrale est censée prise en faisant varier seul, et demeurant constante ; de sorte que la valeur de étant complète, on aurait eu sur-le-champ par son moyen la valeur complète de mais nous avons cru qu’il n’était pas inutile de faire voir comment on y pouvait parvenir aussi par le secours de notre méthode, en supposant que la quantité ne fût regardée d’abord que comme une constante indéterminée.

Sixième Cas. — Lorsqu’il y a entre une équation telle, que et ne remplissent ensemble aucune dimension.

Faisant on aura donc une équation entre d’où l’on tirera

étant une fonetion de et seulement. Or en considérant immédiatement l’équation

ainsi qu’on l’a fait dans le cas précédent, elle deviendra, par les substitutions,

savoir

et l’on voit que cette équation peut devenir intégrable en supposant une fonction de seul (ce qui rendra pareillement une fonction de ), pourvu qu’on ait

savoir

ou bien

équation différentielle entre et d’où l’on pourra, par l’intégration, tirer la valeur de en laquelle contiendra une constante arbitraire De cette manière on aura, par l’intégration,

et ensuite

d’où l’on tirera qu’on substituera ensuite dans l’équation

Au reste, comme on doit avoir dans ce cas étant une fonetion de et on pourra le résoudre aussi plus simplement par la Remarque suivante, à l’aide de laquelle on peut le réduire au cinquième Cas ci-dessus.

Remarque. — Tels sont les principaux cas résolubles, en générale, lorsqu’il y a une équation entre et sans et où par conséquent et peuvent être des fonctions de et seuls ; il faut cependant y ajouter encore ceux dans lesquels il y aura entre ces quatre quantités mêmes équations, mais en échangeant en et réciproquement ; car, à cause de et l’équation de condition est

laquelle, en regardant maintenant et comme des fonctions de et q, peut se mettre également sous la forme

et ont pris la place de et , et vice versâ. Ainsi il n’y aura qu’à traiter ces cas de la même manière que les cas analogues résolus ci-dessus, en supposant qu’au lieu de chercher et en et on cherche au contraire et en et


Septième Cas. — Lorsque est une fonction de et

Soit une fonction de et en sorte que

et soit

l’équation de condition deviendra

il est clair qu’on peut supposer que soit une fonction de seul, sans ni ce qui réduira l’équation à celle-ci

or comme et sont des fonctions données de et il est clair que l’équation précédente ne sera qu’entre ces deux variables, en sorte qu’elle pourra s’intégrer par les méthodes ordinaires ; ainsi l’on aura en et comme l’intégration introduira une constante arbitraire dans la valeur de on pourra en déduire la valeur générale et complète de

En effet, l’équation

ou bien

donnera celle-ci

où le second nombre étant une fonction de et seuls, sera nécessairement intégrable ; de sorte qu’on aura

et de là on tirera la valeur de qui étant supposée égale à servira à déterminer celle de , qu’on substituera ensuite dans l’équation intégrale

Huitième Cas. — Lorsque étant une fonction de et , et une fonction de et

Au lieu de considérer l’équation de condition par laquelle on doit déterminer je considérerai d’abord, ainsi que j’en ai déjà usé plus haut, dans un cas analogue à celui-ci (cinquième Cas), la quantité

qui doit être une différentielle complète, ou dans l’état où elle est, ou après la multiplication par un facteur quelconque Or, mettant à la place de elle devient

et cherchant le multiplicateur qui rendra égale à une différentielle exacte on aura

quantité où est une fonction inconnue, et où est une fonction

connue de ou bien de en mettant à la place de sa valeur tirée de l’équation

Supposons donc que cette quantité, étant multipliée par devienne une différentielle exacte ; il faudra que

soit la différentielle d’une fonction de donc, en regardant d’abord comme constante, il faudra que

soit la différentielle d’une fonction de et ainsi il n’y aura d’abord qu’à chercher le multiplicateur qui rendra intégrable la quantité considérée comme fonction de et seuls. Soit donc

il est clair que contiendra aussi comme constante ; de sorte que si l’on veut maintenant traiter comme variable, on aura, pour la différéntielle complète de la quantité

donc

de sorte que la quantité qui doit être une différentielle exacte deviendra

Or il est visible que pour que cette condition ait lieu il n’y aura qu’à supposer

ce qui donnera une valeur particulière de qui, contenant la constante arbitraire conduira, à l’aide de notre méthode, à la solution générale du Problème. On aura en effet

d’où

et de là

D’où l’on voit que sera une fonction quelconque de en sorte que l’équation, qui donnera la valeur complète de pourra se mettre sous cette forme plus simple

Au reste on peut faire ici une remarque analogue à celle qu’on a faite ci-dessus dans la solution du cinquième Cas, dont celui-ci n’est qu’une généralisation.

Neuvième Cas. — Lorsque étant une fonction de une fonction de et une fonction de

Je considère encore immédiatementla quantité

laquelle, par la substitution de la valeur de devient

je fais

étant une fonction de et j’ai

je suppose maintenant ce qui donne

et divisant ensuite toute la quantité précédente par j’ai

il est clair que cette quantité sera intégrable si l’on fait

étant une constante, car elle deviendra

dont l’intégrale sera

de là on tirera donc la valeur de qu’on fera égal à et il n’y aura plus qu’à substituer la valeur de qui résultera de cette dernière équation, dans celle-ei

Remarque. — Si l’on a une équation entre et on pourra regarder et comme des fonctions de et seuls, et le Problème rentrera dans le cas où l’équation est entre en prenant à la place de à la place de et à la place de car il est visible que l’équation

peut se mettre aussi sous la forme

qui résulte de la précédente, en changeant en en en Il en sera de même, mutatis mutandis, du cas où l’on aura une équation entre et

9. Les cas que nous venons d’examiner renferment d’une manière générale à peu près tout ce qu’on sait sur l’intégration des équations du premier ordre entre trois variables ; d’où l’on voit combien peu on est encore avancé dans cette matière. Le principe que nous avons donné, pour trouver l’intégrale complète d’après une intégrale particulière, est, comme on voit, très-fécond, et suffit seul pour résoudre la plupart des cas où l’intégration réussit. Nous remarquerons cependant sur ce sujet que si, au lieu d’avoir une valeur particulière de laquelle renferme une constante arbitraire, on avait une valeur particulière de renfermant de même une constante arbitraire, on ne pourrait cependant pas trouver par son moyen l’intégrale complète ; mais on pourrait y parvenir si la valeur particulière de renfermait à la fois deux constantes arbitraires.

10. Pour démontrer cette proposition et donner en même temps le moyen de déduire la valeur complète de d’une valeur particulière renfermant deux constantes arbitraires, supposons que cette valeur soit déterminée par une équation entre et laquelle renferme outre cela deux constantes et qui ne se trouvent pas dans l’équation différentielle il est visible que, si l’on différentie cette équation en sorte que l’une des constantes comme disparaisse, on aura une équation différentielle qui sera nécessairement comparable à la proposée

et d’où l’on pourra tirer par la comparaison une valeur de laquelle renfermera encore une constante arbitraire en sorte qu’on pourra ensuite en déduire la valeur complète de Mais si l’équation en et ne renfermait qu’une constante arbitraire, alors il est visible qu’en faisant évanouir cette arbitraire par la différentiation, l’équation différentielle qui en résultera ne renfermera plus de constantes arbitraires ; ainsi l’on ne trouvera qu’une valeur particulière de qui n’aura point de constante arbitraire, et qui sera par conséquent inutile pour la recherche de la valeur complète de

11. Il ne doit point au reste être étonnant qu’une solution particulière, qui renferme deux constantes arbitraires, soit suffisante pour en déduire la solution complète ; car en y regardant de plus près on voit que cette solution remplit presque en entier les conditions de l’équation différentielle, puisqu’on ne peut faire évanouir les deux constantes arbitraires sans tomber dans une équation qui renferme à la fois les différences partielles et en effet, comme il y a deux quantités à éliminer, il faudra avoir trois équations ; ainsi il en faudra encore deux outre la proposée, et ces deux ne peuvent venir que de deux différentiations différentes, l’une en faisant varier et l’autre en faisant varier .

On peut prouver de la même manière que, si l’on a une fonction de trois variables laquelle dépende d’une équation différentielle du premier ordre entre et et qu’on ait une valeur particulière de laquelle renferme trois constantes arbitraires cette valeur remplira presque en entier les conditions du Problème ; car on ne pourra éliminer les trois constantes qu’au moyen de trois différentiations, l’une relative à l’autre à et la troisième à

Et ainsi de suite.

12. En général, soit une fonction de plusieurs variables et soit donnée une équation entre

par laquelle il faille déterminer la valeur de . Supposons que l’on ait une valeur particulière de laquelle renferme les constantes arbitraires dont le nombre soit égal à celui des variables qu’on en tire la valeur d’une de ces constantes comme en sorte que l’on ait

étant une fonction de et de qu’on différentie cette équation, et supposant

on aura, en divisant par l’équation

en sorte que

et ces valeurs seront telles, qu’elles satisferont par l’hypothèse à l’équation donnée. Maintenant, comme la solution du Problème dépend uniquement de ce que l’équation précédente devient intégrable étant multipliée par le facteur c’est-à-dire de ce que

est une différentielle complète de il est clair que la solution aura lieu de même si les quantités au lieu d’être constantes, sont variables, pourvu que la même différentielle continue à être complète or l’intégrale de cette différentielle, tant que sont constantes, est en sorte qu’on a dans cette hypothèse

mais si l’on regarde comme variable, alors on aura

donc

donc comme est par elle-même une différentielle complète, il faudra que soit aussi une quantité intégrable d’elle-même, ce qui ne peut avoir lieu à moins que ne soit égal à une fonction quelconque de Ainsi supposant

et tirant de cette équation la valeur de on pourra la substituer à la place de et l’on aura, au lieu de l’équation celle-ci

étant égal à où il faut remarquer que les quantités peuvent entrer d’une manière quelconque en qualité de constantes dans la fonction et par conséquent aussi dans la fonction Maintenant on pourra rendre de même variable la quantité contenue dans et en prenant

ce qui détermine et substituant ensuite cette valeur de on aura l’équation


et ainsi de suite.

Par ce moyen l’intégrale incomplète

deviendra de la forme

et sera nécessairement complète, puisqu’elle contiendra autant de fonctions arbitraires qu’il y a de variables moins une[1].

13. Pour faire voir l’usage de cette méthode par un exemple très général, supposons que soit une fonction de et que en soit une de et que en soit une de et et ainsi de suite, et que l’on ait une équation donnée entre d’où il faille tirer la valeur de comme le Problème consiste à faire en sorte que la quantité

soit intégrable ou par elle-même ou étant multipliée par un facteur quelconque, en supposant

il est clair que la condition du Problème sera remplie si est une fonction de seul, de seul, de seul, etc. ; or c’est ce qui aura lieu si l’on fait égales à des quantités constantes ; car alors l’équation donnée servira à déterminer une de ces constantes par toutes les autres, en sorte qu’il restera autant de constantes arbitraires, qu’il y aura de variables moins une. De cette manière on aura

pour l’équation qui détermine la valeur particulière de et, comme cette valeur de contient les constantes arbitraires on pourra compléter la solution par la méthode exposée ci-dessus.

14. Il est clair qu’on peut généraliser encore le cas précédent, en supposant que soit une fonction quelconque de et que l’on ait égal à une fonction de et une fonction de et , une fonction de et car en faisant constantes, on aura égal à une fonction de seul divisée par égal à une fonction de seul divisée de même par de sorte que la quantité

étant multipliée par deviendra intégrable.


Séparateur

  1. L’analyse qui vient d’être développée conduit assurément à l’intégrale générale de l’équation proposée, mais cette intégrale ne contient pas, comme le dit ici par inadvertance l’illustre Auteur, autant de fonctions arbitraires moins une qu’il y a de variables indépendantes. Dans la formule obtenue par Lagrange, il n’y a en réalité qu’une seule fonction arbitraire, laquelle dépend des quantités Si l’on représente cette fonction par l’intégrale générale de l’équation proposée sera le résultat de l’élimination de entre l’équation

    et les suivantes

    (Note de l’Éditeur.)