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a mis ses lunettes, a pris sur l’étagère un grand livre, et après l’avoir dépoussiéré, il l’a ouvert et a lu à vive voix :

« CHÈVRE. Si une chèvre tu vois en rêve, s’il advient qu’icelle est noire de couleur, et si cornes enroulées elle porte, il [cela] signifie qu’une lettre prestement tu recevras, en recommandé de tes parents d’Amérique.

« Telle était la chèvre, cependant le villageois n’avait pas de famille en Amérique.

« Le chantre a mis ses lunettes au bout de son nez et a lu une autre page :

EAU. Si de l’eau tu vois, d’une fontaine jaillissant et que grand bruit fait l’eau dans la cruche, alors tu seras mêlé à dispute. Si d’un sillon coule cette eau…

D’une chèvre ! cria le villageois. Que dit le livre quand l’eau coule d’une chèvre ?

Le livre ne dit rien pour une telle question, a répondu le chantre, bien qu’il soit le recueil de mille ans de rêves, écrit par les sages de ce monde.


« Quand il vit que même le livre échouait à expliquer son rêve, le villageois a bien cru qu’un grand malheur allait s'abattre sur lui.

« Compère ! lui dit alors un autre villageois, pourquoi chercher à t’embrouiller ? La chose est claire.

La chèvre mange la végétation. La végétation retient les sols et les cailloux sur les coteaux. Si la verdure est mangée, les pluies emportent le sol et les cailloux jusqu’au torrent. Le torrent gonfle, descend dans la plaine et dévaste tout. Si la verdure est à sa place, il n’arrive rien