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IRÈNE ET LES EUNUQUES

le poudroiement de la cavalerie. La Régente le reçut avec beaucoup d’honneur. Jean voulut que l’on fêtât extraordinairement l’habile ministre qui le secondait. Staurakios triompha solennellement dans l’Hippodrome avec une splendeur inaccoutumée. Byzance n’avait rien vu de pareil depuis Bélisaire.

Irène comptait alors deux ans de pouvoir.

Ses adversaires semblaient partout défaits aussi bien par l’opiniâtreté de ses armes que par l’adresse de sa politique et l’énorme activité de ses eunuques. Au pouvoir précaire d’autrefois, maintenu contre l’hostilité du peuple selon la faveur instable des troupes, succédait un gouvernement en équilibre sur ces deux forces, sachant acquérir les sympathies des masses au moyen d’une économie sociale admirablement improvisée, sachant, de plus, occuper l’inquiète brutalité des soldats par des expéditions militaires, avant de la réprimer par d’énergiques coups d’État.

Byzance n’armait que contrainte, et pour conclure les querelles au moyen d’alliances commerciales.

La prospérité accrut étrangement sous cette administration. Les excellences du règne de Justinien se renouvelèrent. Partout la culture des champs occupait les bras des captifs. Les routes sûres se creusaient d’ornières sous le faix des chariots colportant les richesses qui passaient d’Orient en Occident. La vertu géographique de Byzance en faisait le comptoir du monde le plus achalandé entre la civilisation de l’Asie et la barbarie de l’Europe.