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IRÈNE ET LES EUNUQUES

Irène alors se remit à l’étude. Bythométrès chargea de parchemins les mains propices de l’initiée. Les sciences incluses aux anciens livres de l’hermétisme alexandrin révélaient les conseils nécessaires pour établir l’harmonie des éléments humains en présence dans le corps de l’empire. Irène reconquit sa précellence intellectuelle.

Assise sous les tendelets impériaux, à l’extrême pointe d’un promontoire dominant les eaux rapides du Bosphore, elle passait les soirs, avec le Mesureur de l’Abyme, devant l’immortelle splendeur du ciel levantin. À se voir reflétée dans les vasques de métal, et resplendissante comme la Mère du Iésous en la châsse pompeuse de ses vêtements qui miraient les scintillantes étoiles sur chaque facette de leurs joyaux, elle écouta chanter ses espoirs de triomphe. Sa mémoire reconstituait les enseignements logiques d’autrefois que précisait l’eunuque à la voix changeante. Elle se demandait pourquoi les arbitres du monde négligent si facilement la joie de sentir leur esprit, vivifier les âmes de millions d’êtres, et leur imprimer une cadence d’efforts réalisant le principe même qui les suscita. Renoncer à cela pour sacrifier à des appétits ! Irène ne comprenait plus son erreur. Les monarques des temps défunts défilaient, devant son souvenir, courbés sous le ridicule de passions humbles pour l’assouvissement desquelles le pouvoir ne leur avait paru qu’un moyen. Elle éprouvait de la honte à songer qu’elle compterait un jour, aux pages des annales, dans la série de ces princes.