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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

Jean devait être : il avait allumé un rat-de-cave, et cherchait partout, projetant des ombres fantastiques.

Un léger bruit qu’il entendit le porta à pénétrer dans une galerie transversale abandonnée. Il s’y engagea avec précaution, abritant d’une main son luminaire contre les courants d’air ; et ce fut un soulagement pour Jean de le voir s’éloigner. Mais bientôt le pauvre garçon se sentit pris de la crainte de se trouver perdu dans ce dédale inextricable formé de boyaux étroits, bas de voûte, accidentés de trous de mine. Se courbant en deux, se dissimulant derrière chaque inégalité des parois raboteuses, il se glissa à la suite de Hans Meister, espérant ainsi arriver jusqu’à un endroit où des mineurs pourraient prendre sa défense.

Mais l’Allemand marchait maintenant d’un pas hésitant ; il s’était perdu dans les galeries, ne reconnaissait plus son chemin. Mieux valait encore le suivre que de demeurer dans l’obscurité. C’est ce que fit Jean, tremblant d’émotion, suffoqué par des émanations, craignant par-dessus tout de perdre la piste de ce scélérat, aussi méchant que fou, qui lui faisait bien plus de mal encore qu’il n’avait cru lui en faire.

Jean se trouva bientôt à l’extrémité d’une sorte d’excavation provenant de tailles anciennes ; les veines en avaient été fouillées dans tous les sens. Il voyait Hans Meister à l’ouverture de cette sorte de carrière noire, séparé de lui par les aspérités d’un sol qui s’exfoliait sous les pieds, quelques roches dures contournées par le pic des mineurs, une double rangée de troncs de bouleaux étayant la voûte basse, fendillée. Sur sa droite la houille s’effondrant sous ses talons et le pied lui manquant, il faillit glisser dans une eau stagnante accumulée dans un fond.

Jean se demandait avec appréhension si le clapotement de cette eau réveillée par lui de son sommeil, n’allait pas faire retourner l’Allemand, lorsqu’une lueur passa devant ses yeux, éclairant avec une intensité fulgurante le lieu bouleversé où il se trouvait au fond de la terre. Il recula vivement et porta les mains à ses yeux comme pour les préserver de cette flamme, et il fut secoué par une terrible commotion, renversé et couvert de débris.

Mais aussitôt, au loin, un roulement sourd gronda comme un écho grandissant, et soudain retentit une détonation formidable, suivie d’un bruit d’écroulement : le plus épouvantable fracas de blocs de houille lancés contre les parois des galeries, de pierres arrachées aux murailles de soutènement, de charpentes projetées avec force ; un volcan s’était allumé dans la mine : le grisou, trombe de feu qui arrache, qui broie, qui tord, qui dis-