baronne, que sa situation vis-à-vis du jeune Parisien justifiait de toute indiscrétion.
Jean se retourna, cherchant Méloir derrière lui. Il ne l’y trouva pas, — naturellement — et il se rappela cette bonne odeur de cuisine qui avait déterminé le Breton à rester en arrière. Très décontenancé, ne sachant comment expliquer l’objet de son voyage, Jean osa faire appel aux souvenirs de la fille de la baronne.
— Mademoiselle, dit-il, vous n’avez pas oublié ce Breton si sec, si noir, si querelleur… mais si honnête, si respectueux… qui suivait la loge…
— De votre oncle Risler ?
— Oui, et se rendait utile… de diverses manières ?
— Méloir ? n’est-ce pas ?
— Méloir. Eh bien ! je l’avais ramené à Landerneau où ses parents sont établis, pour le réconcilier avec eux : nous sommes arrivés tout juste pour assister au mariage de sa fiancée ; et moi, au désespoir du pauvre garçon.
— Vilain voyage en effet ! observa la baronne. Mais si cela nous apprend ce que vous êtes allé faire à Landerneau, nous n’en sommes pas renseignés davantage sur votre venue à Caen.
— Eh ! madame la baronne, ne le devinez-vous pas ? N’ayant pas réussi à le faire rentrer chez lui, je lui cherche une place dans votre maison…
La baronne regarda sa fille, bien qu’en cette matière elle considérât comme inutile de la consulter.
— Ce n’est pas facile, dit-elle. Et vous le comprendrez, Jean : ce garçon si honnête, si respectueux qu’il soit, a été pour ma Sylvia un compagnon dans des jours douloureux et qui doivent être oubliés : ce serait un mauvais serviteur.
— Je n’y avais point pensé ! balbutia Jean, fort désappointé.
— Ce sont des choses auxquelles on ne pense pas à votre âge, fit la baronne, mais ne vous inquiétez pas de ce garçon : nous le caserons quelque part, soyez-en sûr ; M. du Vergier nous y aidera ; au besoin, je m’en charge.
— Je vais vous le présenter, alors, madame, puisque vous montrez tant d’intérêt pour lui.
— C’est entendu. Mais vous, Jean que devenez-vous ? que faites-vous ? Où en êtes-vous de la poursuite qui vous tenait tant à cœur ?
Jean exposa à la baronne le motif de son voyage au charbonnage de Lourches, la catastrophe à la suite de laquelle il lui avait écrit, et enfin l’heureux résultat obtenu par l’examen de la valise du complice de Jacob. Ma-