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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

— Diabel ! l’heure ! l’heure ! aôh ! je avais oublié, cria sir William. Adieu ! Je parté… Vous réfléchirez.

Le jeune du Vergier se sentait sur les épines.

— C’est tout réfléchi, dit-il, nous allons avec vous. Chemin faisant je vous parlerai d’une belle occasion qui se présente, si vous voulez réellement acheter un vaste domaine, un département tout entier…

— « Really ? » dit l’Anglais devenu très attentif et observant jusqu’à quel point le jeune du Vergier pouvait croire à sa folie simulée.

— J’ai votre affaire, sir, mais il faut se presser. Il y a acquéreur. Le marché ne tient plus qu’à cent millions.

— « Pshaw ! » fit le baronnet. Je ne regardé pas au prix, môa. Je voulé acheter, voilà tout !

— Alors, il nous faut d’abord renoncer à aller chasser l’isard du côté de Luchon.

— Très bien ! murmura Jean pour encourager son ami.

— Et c’est une privation pour moi, ajouta Maurice d’un ton hypocrite, de ne pas aller dans les montagnes tuer deux ou trois de ces chamois si lestes !

L’Anglais réfléchissait gravement.

— Voyez-vous, dit-il, ce qu’il me faut c’est une forêt… traversée par une rivière ; je voulé un château pour milady à un bout et un château pour moi à l’autre bout. Est la chose possible ?

— Très possible, fit Maurice. Et déjà miss Kate se doutant de votre intention a fait la moitié du chemin ; elle est en Normandie, à Caen, chez ma mère.

— Ohâ ! cria le baronnet. Ce fut comme un rugissement. Et il pirouetta sur lui-même, vivement impressionné par ce que lui apprenait Maurice. Kate, sa petite Kate chez les du Vergier ! Donc on le cherchait ; milady croyait à sa folie ! Ça prenait. Très bien ! All right ! Mais Kate affligée, c’était fort pénible pour le baronnet, qui demeurait malgré tout attaché à ses enfants.

— On pourrait la consulter ? insinua Maurice.

Le baronnet joua l’indifférence. Levant la tête et faisant avancer sa barbe par un mouvement du menton, il se mit à se gratter le cou : ce geste semblait activer chez lui la réflexion. Très drôle il était dans cette attitude, avec son bonnet écossais noué en arrière !

— Pas encore, finit-il par dire. D’abord, môa je ne renoncé pas à chasser les petites l’isards.

Maurice échangea un regard d’intelligence avec Jean.