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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/651

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

La vallée du Lys est l’une des plus charmantes des Pyrénées : ses prairies, ses forêts, ses pâturages parsemés de granges, ses cascades et son amphithéâtre de glaces offrent une succession de vues admirables. Le baronnet dans son enthousiasme semblait ne plus pouvoir s’en arracher. C’est en vain que Maurice le pressait : il voulait tout voir, et Maurice et Jean devaient aller se promener avec lui bien que, dans leur impatience de mettre fin à cette situation, les merveilles que présentent les Pyrénées commençassent à les trouver un peu froids.

Un matin, le baronnet voulut les conduire au fort de Vénasque. À cheval dès six heures, nos touristes, suivis de Méloir qui ne montait pas trop mal, se mirent en chemin par un beau temps et un soleil déjà très chaud. Amusés par les réflexions du Breton, ils arrivèrent jusqu’aux cinq lacs qui, vus d’en haut, forment un groupe très pittoresque. Le plus grand de ces lacs est d’un bleu presque noir ; le ciel et les montagnes s’y réfléchissent.

Enfin ils parvinrent au fort : un pas de plus, ils étaient en Espagne. Devant eux se trouvait le mont Maudit, — la superbe Maladetta et son magnifique glacier, beau massif de roches et de glaces où une forêt tombe de vétusté sans porter les marques de la main de l’homme.

Longuement, ils admirèrent dans sa couleur vitreuse, dans ses larges crevasses, dans ses reliefs formidables, ce magnifique glacier, le plus vaste et le plus dangereux qui soit aux Pyrénées : il rejette une telle quantité de débris, qu’on entend sans cesse le bruit des roches qui tombent, et qui en rendent sur plusieurs points les approches périlleuses.

Le lendemain fut un jour de repos forcé ; mais dans la nuit ils montèrent sur le Montné pour assister au lever du soleil. C’est un belvédère d’où l’on découvre presque toutes les Pyrénées centrales.

Aux premières lueurs de l’aube, ils virent tout l’espace occupé par une couche de nuages formant un espèce de sol aérien. Au travers de ce rideau s’élançaient les pics les plus élevés qui trouaient cette nappe de brouillards et surgissaient au-dessus comme des îles dans une mer très calme.

Le soleil se leva resplendissant du côté de l’Italie, créant des oppositions d’ombres et de lumières et éclairant de teintes magiques le lacis immense de cimes, de pics, de chaînes, qui semblèrent s’élever, s’arrondir et onduler. Les premiers rayons du soleil donnèrent une coupe nette et hardie à ces hautes roches dont les larges assises s’alignent en murailles, s’ouvrent en amphithéâtres, se façonnent en gradins, s’élancent en tours, éclairant chaque relief du sol, chaque lit de ruisseau. Alors de grandes ondulations, de grandes