Page:Anonyme - La goélette mystérieuse ou Les prouesses d'un policier de seize ans, 1886.djvu/58

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M. Robert Halt, il s’était promené sur le quai, dans l’attitude d’un flâneur ; et il avait trouvé le moyen de flatter la vanité de l’homme aux cheveux roux, en lui faisant des compliments sur la beauté de son bâtiment. Quelques rasades s’en étaient suivies, dans un bar du voisinage. Mais l’homme aux cheveux roux n’était pas communicatif ; ou bien, peut-être, il n’avait rien à dire. Lafortune avait appris de lui qu’il s’appelait Nazaire Langlois, qu’il était capitaine de la Marie-Anne et que la goélette était équipée (il le disait du moins) pour le commerce du poisson. Mais il n’avait pu en tirer aucun autre renseignement.

— Aujourd’hui, nous n’avons pu que rompre la glace, se disait-il à lui même en guise de consolation. Une autre fois, nous ferons mieux. C’est bien le diable si je ne parviens pas à me faire offrir de visiter cette goélette et à tirer à clair ce qu’il y a dedans.

En s’avançant sur le bord du quai, Lafortune aperçut notre ami Joe, appuyé sur un pilier et livré à une méditation si profonde, qu’il ne parut pas même se rendre compte que son oncle se dirigeât de son côté. Le gamin continua à se tenir à la même place, sans faire un mouvement, jusqu’au moment où Lafortune fut arrivé assez près, pour lui donner une tape sur l’épaule.

— Eh ! Joe, mon garçon, est-ce que tu es devenu sourd et aveugle ?

— Je vous avais très bien vu, répondit le gamin sans détourner la tête, mais ce n’est pas vous qui êtes mon gibier.

— Je veux être pendu s’il n’a pas le vrai instinct du métier ! fit Lafortune avec admiration. Sur quel gibier es-tu en arrêt aujourd’hui ?

— Voyez vous cet homme qui cause avec « M. Cheveuxroux. »

— Parfaitement.