Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/384

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toux ! J’y suis sujette depuis que je suis au monde. À l’âge d’Éva, on m’a crue poitrinaire. Mamie passait toutes les nuits à me veiller. Ah ! qu’est-ce que la toux d’Éva en comparaison !

— Mais elle s’affaiblit ; sa respiration devient courte.

— Seigneur ! je connais assez cela, et depuis des années ! — Une affection nerveuse.

— Mais elle a des sueurs la nuit.

— C’est moi qui ai eu, ces dix dernières années, des transpirations prodigieuses ! à tordre tout ce que je porte. Pas un fil de sec dans mes habillements de nuit, et Mamie est forcée de faire sécher mes draps ! Certes, les sueurs d’Éva ne sont pas à comparer. »

Miss Ophélia fut donc pour le moment réduite à se taire. Mais aujourd’hui qu’Éva se trouvait sérieusement atteinte, visiblement abattue, et qu’un médecin était appelé, Marie changea de note tout à coup.

« Elle le savait ! — elle l’avait toujours pressenti ! elle était condamnée à devenir la plus malheureuse des mères ! Avec sa misérable santé, voir son unique enfant dépérir, descendre sous ses yeux dans la tombe ! » Et Marie, en vertu de ce nouveau chagrin, mettait chaque nuit le sommeil de la pauvre Mamie en déroute, et persécutait, tracassait, tourmentait tout le long du jour.

« Ma chère Marie, ne dites pas ces choses-là, de grâce ! insistait Saint-Clair ; nous n’en sommes point à désespérer.

— Vous n’avez pas le cœur d’une mère, Saint-Clair ; jamais vous n’avez pu me comprendre : — comment me comprendriez-vous aujourd’hui !

— Mais ne parlez pas du moins comme si tout était perdu.

— Je n’ai pas votre heureuse indifférence, Saint-Clair. Si le danger de votre unique enfant vous laisse calme, vous ; moi, c’est autre chose. Ce coup est trop affreux, après tout ce que j’ai supporté.