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commit pour l’examiner les conseillers au grand conseil Antoine de Vuldere, Gilles Stalins et Pierre Weyms, à l’intervention du conseiller fiscal Hovyne[1].

Ces commissaires se transportèrent à Anvers le 6 juillet ; ils procédèrent à son interrogatoire les 11, 12, 27, 28, 29 du même mois et les 4, 5 et 8 août. Il protesta d’abord qu’il ne pouvait reconnaître d’autres juges que le roi et les chevaliers de la Toison d’or ; néanmoins, vu la difficulté de réunir un nombre suffisant de confrères de l’ordre, et le désir qu’il avait d’obtenir une prompte justice, il consentait à se soumettre au jugement du grand conseil. Cette protestation faite, il se montra prêt à répondre aux questions qui lui seraient posées. Il avoua, sans détour, qu’il avait témoigné de la mauvaise humeur contre plusieurs des ministres, à la suite de la mesure qui l’avait privé de son commandement en 1629 ; mais sur tous les autres chefs d’accusation, comme d’avoir eu connaissance des machinations du comte de Bergh, d’avoir pris part aux complots du comte d’Egmont et du prince d’Epinoy, d’avoir tenu des discours séditieux, d’avoir sollicité l’appui du roi de France contre les Espagnols, d’avoir entretenu des pratiques avec le résident du roi d’Angleterre à Bruxelles, d’avoir, pendant la campagne de 1633, donné avis au prince d’Orange de l’état de l’armée royale, il nia absolument et avec persistance, disant entre autres, sur le dernier point, « qu’il n’était traître ni descendu du sang de traître. » La présomption la plus forte contre lui et dont le fiscal se prévalait surtout, résultait du billet que, le lendemain de son emprisonnement à la Alameda, le duc d’Arschot avait écrit au comte-duc d’Olivarès, billet où il déclarait que le prince de Barbançon l’avait plusieurs fois sollicité de s’éloigner de la cour, en l’assurant que tout le monde le suivrait[2]. Albert de Ligne soutint que nulle foi ne devait être ajoutée à la déclaration du duc, parce qu’elle était extrajudicielle ; qu’elle avait été faite en prison et inspirée peut-être au prisonnier par le désir de sa délivrance ; qu’elle ne spécifiait ni le temps ni le lieu où les propos qui lui étaient attribués auraient été tenus ; qu’on devait y attacher d’autant moins d’importance que, selon le propre dire du duc, il ignorait le but dans lequel on l’engageait à quitter la cour ; enfin que, si celui-ci eût soupçonné qu’une telle suggestion cachait de mauvais desseins, il n’était pas vraisemblable qu’il eût autant insisté auprès de l’infante pour la convocation des états généraux[3].

Les commissaires, en rendant compte au marquis d’Aytona de l’interrogatoire du prince, avouèrent qu’il n’existait d’autre preuve contre lui que la déclaration du duc d’Arschot, « laquelle il avait débattue et contredite par beaucoup d’arguments et de raisons qui semblaient être de considération[4] ; « ils exprimèrent toutefois l’avis qu’il y avait matière suffisante à lui faire son procès, si les fiscaux se trouvaient munis d’autres preuves que celles déjà vues[5]. » Les fiscaux prétendirent qu’ils seraient en mesure d’en administrer. Le gouvernement donna des ordres en conséquence aux commissaires, et ceux-ci, le 26 septembre, rendirent une sentence interlocutoire portant qu’il serait passé outre, par-devant eux, à la parinstruction du procès[6]. Lorsque cette sentence fut signifiée à Albert de Ligne, il se borna à répondre « qu’il persistait en ses protestations précédentes, et qu’au surplus le roi, de son autorité souveraine, pouvait disposer de lui comme il trouverait convenir[7]. » Des informations furent prises en différents endroits, à la requête des fiscaux, sans qu’elles révélassent des faits graves à sa charge et sans qu’on lui fît subir de nouveaux interrogatoires. Sur ces entrefaites, le cardinal-infant, frère de Philippe IV,

  1. Archives de l’office fiscal du grand conseil.
  2. Voy. Biogr. nat., p. 396.
  3. Les interrogatoires originaux du prince de Barbançon sont aux Archives du royaume, dans le fonds de l’office fìscal du grand conseil.
  4. Lettre des commissaires au marquis d’Aytona, du 9 août 1634. (Papiers du président Roose, t. LXIX, fol. 262, aux Archives du royaume.)
  5. Lettre du 22 août 1634. (Ibid., fol. 245.)
  6. Archives de l’office fiscal du grand conseil.
  7. Lettre du greffier Van Paeffenrode aux commissaires, du 28 septembre 1634. (Ibid.)