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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

— Mais, en attendant, dites-moi comment il est. »

Mlle Halliday insista pour qu’on lui fît un portrait détaillé de la personne de Lenoble.

Diana lui fit ce portrait, mais non sans un léger embarras : elle ne pouvait y mettre de l’enthousiasme, bien que sentant au fond du cœur pour Lenoble une chaleur de sentiment qui la surprenait.

« Quelle hypocrite vous êtes, Diana ! s’écria Charlotte quand elle se fut exécutée. Je sais que vous aimez ce bon Français presque aussi tendrement que j’aime Valentin et que la pensée de son affection vous rend heureuse ; et néanmoins vous parlez de lui par petites phrases sèches, et vous ne pouvez pas montrer le moindre enthousiasme, même pour sa belle tournure.

— Il est difficile de passer des rêves à la réalité, Charlotte. J’ai vécu si longtemps dans les rêves, qu’au réveil le monde me semble étrange.

— C’est uniquement une manière poétique de dire que vous êtes honteuse d’avoir changé d’idée. Je dirai à M. Lenoble quelle sournoise créature vous êtes et à quel point vous êtes indigne de son amour.

— Vous lui direz tout ce qui vous plaira. Mais rappelez-vous, chère amie, que mon engagement doit être tenu secret encore quelque temps, même pour votre chère maman. Papa attache à cela une grande importance et j’ai promis d’obéir, quoique j’ignore complètement ses raisons. »

Mlle Halliday se soumit à tous les désirs de son amie, en la priant seulement de la présenter à Lenoble.

Diana promit de lui accorder ce privilège, mais on ne tarda pas à s’apercevoir que ce serait pour le moment très-difficile.

Depuis quelque temps, depuis le jour où Charlotte