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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/135

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LA FEMME DU DOCTEUR

trop amoureux, il avait trop conscience de la grâce et de la beauté d’Isabel, et de sa propre indignité, pour tenter le diable par une pareille question. Si elle voulait l’épouser et se laisser aimer en récompensant son dévouement par un peu d’amour, cela suffirait amplement pour satisfaire ses désirs les plus ambitieux.

— Chère Isabel, vous m’épouserez, n’est-ce pas ?… vous ne me refuserez pas, n’est-ce pas ?… vous auriez dit non depuis longtemps ; vous ne seriez pas assez cruelle pour me laisser espérer, même une minute, si vous vouliez me repousser…

— Je vous connais… et vous me connaissez depuis si peu de temps, — murmura la jeune fille.

— Mais assez longtemps pour vous aimer d’un amour qui durera autant que ma vie, — répondit chaleureusement George. — Je n’aurai d’autre pensée que celle de vous rendre heureuse, Isabel. Je sais que vous êtes si belle que vous devriez épouser un tout autre homme que moi… un homme qui pourrait vous donner une maison magnifique, des chevaux et des voitures, et tout ce qui en est la conséquence ; mais il ne vous aimerait pas mieux que moi et il ne vous aimerait peut-être pas aussi bien. Isabel, pour vous je travaillerai comme aucun homme n’a travaillé avant moi. Vous ne saurez jamais ce que c’est que la pauvreté, mon ange, si vous voulez être ma femme.

— Je n’aurais pas peur de la pauvreté, — répondit Isabel d’un ton rêveur.

Elle songeait que Walter Gay avait été pauvre, et que le grand événement de la vie de Florence avait été le mariage discret dans une petite église de la Cité et le long voyage sur mer en compagnie de son jeune époux. Cette pauvreté-là était aussi séduisante que la