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DU SERPENT.

près du riche Indien pour le prier de vouloir bien représenter ses habitants au grand congrès de Westminster. Mais M. Harding et mistress Marwood ne frayèrent aucunement avec Slopperton, et ils furent désormais tenus pour gens mystérieux, pour ne pas dire dangereux.

Le frère et la sœur sont assis devant la cheminée, dans le petit salon bien chaud, bien éclairé et bien confortable du Moulin Noir. Mistress Marwood a dû être belle, mais sa beauté a été détruite par les soucis et les incertitudes qui usent l’espérance la plus forte, comme l’eau tombant goutte à goutte use le roc le plus dur. M. Harding ressemble beaucoup à sa sœur, mais si son visage est vieux, il ne paraît pas trop soucieux. C’est le visage d’un excellent homme, que ni les craintes ni les tracas ne sauraient rendre inquiet. Il adresse la parole à mistress Marwood :

« Et vous n’avez pas eu de nouvelles de votre fils ?

— Depuis près de sept ans. Sept ans d’incertitude cruelle ; sept ans pendant lesquels chaque coup frappé à la porte semble frappé sur mon cœur, chaque pas sur le sable du jardin vibre dans mon âme.

— Et vous ne croyez pas qu’il soit mort ?

— J’espère qu’il ne l’est pas, et je prie ; il n’est pas mort, non ; il n’est pas mort sans se repentir ; il n’est pas mort sans ma bénédiction ; il ne m’a pas