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LES OISEAUX DE PROIE

— Personne d’autre ici, mais en Angleterre vous avez votre vieille amie… la femme chez laquelle vous avez été en pension. Croyez-vous qu’elle refuserait de vous donner un asile momentané, si vous le lui demandiez au nom de la charité ?

— Non, je ne crois pas qu’elle s’y refuserait… Elle a toujours été bonne pour moi. Mais pourquoi faut-il que je retourne à Londres ?

— Parce qu’il faut rompre à tout prix le lien qui vous unit à votre père.

— Mais pourquoi ?

— Pour la meilleure ou la pire des raisons. Votre père a tenté ce soir un coup qui jusqu’à présent lui avait réussi. Il n’a pas pris toutes les précautions nécessaires ou ne s’est peut-être pas assez défié de l’habileté de son adversaire… Je ne sais : toujours est-il qu’il a été pris en flagrant délit et qu’il a été arrêté…

— Arrêté pour avoir volé au jeu ! » s’écria la jeune fille avec une indicible expression d’horreur et de dégoût.

Valentin avança le bras pour la soutenir, croyant qu’elle allait défaillir. Cela fut inutile. Elle resta droite devant lui, très-pâle, mais ferme comme un roc.

« Et vous voulez que je parte !

— Oui, je veux que vous quittiez cette ville avant qu’on sache que vous êtes la fille de votre père. Pour votre avenir vous n’avez rien de pis à redouter. Croyez que je ne veux que votre bien, Diana, et laissez-vous guider par moi.

— J’y consens, répondit-elle avec une sorte de résignation désespérée. Il est affreux de retourner en Angleterre, sachant que j’y serai seule au monde ; mais je ferai ce que vous me dites de faire. »