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LES OISEAUX DE PROIE

jette, vous le savez ; et ses oiseaux chantent trop fort. Ne trouvez-vous pas, Diana, que les canaris, chantent trop fort ? On m’aurait fait dire trop fortement à la pension ; mais il n’y a que les gens très-savants qui savent employer les adverbes. »

Mlle Halliday, ayant dit tout ceci d’un ton précipité et presque hors d’haleine, s’arrêta subitement, rougissant plus encore, si c’est possible, et ayant conscience de sa rougeur. Elle regardait Diana d’un air suppliant, mais Diana ne venait point à son secours ; et ce jour-là Valentin ressemblait à un homme qui aurait été subitement frappé de mutisme.

Une petite discussion sur le temps qu’il faisait suivit ce silence. Mlle Halliday était poursuivie par l’idée qu’il allait pleuvoir ; peut-être pas immédiatement, mais la pluie lui semblait inévitable avant la fin de l’après-midi. Ce n’était point l’opinion de Valentin ; il était même convaincu qu’il ne tomberait point d’eau ; il avait une idée vague que le vent soufflait du Nord ; il risqua même une citation tendant à prouver qu’il ne saurait pleuvoir quand le vent vient du Nord. Charlotte et Valentin tinrent bon, et la discussion dégénéra presque en querelle, vous savez, une de ces querelles qui sont un des plus délicieux passe-temps des amoureux.

« Je parierais une fortune, si j’en avais une à perdre, qu’il pleuvra très-certainement, dit Charlotte avec un œil enflammé.

— Et je n’hésiterais pas à jouer ma vie sur le contraire, » s’écria Valentin, regardant avec une tendresse non dissimulée le gracieux visage de son adversaire.

Diana ne prit aucune part à la discussion. Elle marchait bien sérieusement à côté de son amie Charlotte, aussi séparée, dans sa pensée, de son ancien compa-