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LES OISEAUX DE PROIE

un Goodge qui prêchait dans le magasin du drapier, et ce furent les édifiants sermons d’un Goodge qui développèrent la piété de Mlle Rebecca Caulfield, plus tard Mme Haygarth.

« — Ce Goodge était mon grand-oncle, dit le courtois Jonas, et personne dans Ullerton n’était en meilleurs termes que lui avec Rebecca Caulfield. J’ai bien souvent entendu ma grand’mère en parler. Elle avait coutume de lui envoyer des volailles et des fruits de son jardin de Dewsdale. C’est même à l’instigation de mon grand-père qu’elle a largement contribué à l’érection de la chapelle dans laquelle j’ai le privilège de prêcher.

« Je sentis que j’étais tombé sur une mine d’or. Je me trouvais en présence d’un homme d’esprit frisant la cinquantaine, non plus d’un vieux loup de mer ou d’un radoteur. Il pouvait fort bien se rappeler les paroles d’une grand’mère qui avait connu la femme de Matthieu Haygarth. Et la pensée de cette visite à M. Goodge était venue de moi-même ; la clairvoyance de Sheldon n’y était pour rien. Je sentis que j’étais en progrès dans mon rôle d’inquisiteur.

« — Je suis employé à la poursuite d’une affaire qui a quelques rapports éloignés avec l’histoire de la famille Haygarth, dis-je, et si vous pouvez me donner quelques renseignements à ce sujet, je vous en serais extrêmement obligé.

« J’appuyai sur l’adjectif « éloigné » et me considérai dans mon for intérieur xomme un Talleyrand au petit pied.

« — Quelle espèce de renseignements désirez-vous ? me demanda gravement M. Goodge.

« — Tout ce qui peut avoir rapport à Matthieu Haygarth ou à sa femme.