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LES OISEAUX DE PROIE

son mari. Il échoua. L’apathie léthargique de Tom ne put se dissiper et le courage de Georgy allait en diminuant à mesure que ses craintes augmentaient.

Elle aurait bien désiré appeler un autre médecin, elle aurait bien voulu chercher ailleurs quelque élément de tranquillité et de consolation ; mais elle avait peur d’offenser Philippe comme d’alarmer son mari. Il en résulta qu’elle attendit, en continuant de lutter contre son anxiété croissante. Sheldon n’avait-il pas assuré que la maladie de son mari était sans gravité ? Quel motif pourrait-il avoir de la tromper ?

Un bol rempli de bouillon était sur la petite table, à côté du lit ; il y était depuis des heures sans avoir été touché.

« Je me suis donné tant de peine pour le faire bon, dit d’un ton de regret Mme Woolper, comme elle passait près de la petite table pour arranger le lit ; et le pauvre M. Halliday n’en a pas pris une cuillerée. Il ne vaudrait plus rien demain. Comme, avec mes allées et venues continuelles, je n’ai rien mangé à dîner, je le ferai réchauffer pour mon souper. Rien ne va bien dans la maison, madame Halliday, car vous ne mangez pas non plus ; et, quant à faire un dîner pour M. Sheldon, autant vaudrait jeter la viande dans la gouttière ; il y aurait au moins chance que les chats en profitent.

— Philippe a donc perdu l’appétit, Nancy ? dit George.

— Je dois le croire, monsieur George. Hier, j’ai fait rôtir un poulet pour lui et Mme Halliday ; ils n’en ont pas mangé une once à eux deux. C’était pourtant un joli poulet bien tendre, cuit à point, avec du cresson frais autour… Il suffit d’une maladie pour en amener d’autres, bien sûr… De sa vie je n’ai vu votre frère aussi abattu que maintenant.